Le Vaudou d'Haïti et de Louisiane
Des révoltes éclatèrent dans les possessions d'Amérique après la
Révolution de 1789 parce que la
Convention tardait à y proclamer l'abolition de l'esclavage.
Á
la Dominique, le pouvoir tomba dans les mains d'un révolté
noir,
Toussaint Louverture, qui proclama, en 1801, une constitution originale
et très intéressante. Abolissant toute distinction
entre blancs et noirs, elle donnait une grande autonomie à
l'île qui s'affirmait cependant française. L'article 6 de son Titre III
faisait du Catholicisme le seul culte autorisé, bannissant le
Vaudou. C'est alors que les adeptes gagnèrent la Nouvelle Orléans, en
Louisiane, avec les maîtres blancs apeurés. Bonaparte
rejeta la sécession. Il fit rétablir l'esclavage dans
les colonies d'Amérique et envoya une expédition pour reconquérir
la Guadeloupe puis la Dominique. Capturé, Toussaint mourut en France. Il
fut finalement remplacé par Jean-Jacques Dessalines, un
chef intraitable qui fit massacrer les blancs et vainquit les
troupes françaises. Il fit de l'île, la première république
noire libre et lui donna le nom d'Haïti, et s'en proclama
empereur absolu sous le nom de Jacques 1er. Sa constitution de 1805
y abolissait définitivement l'esclavage et rétablissait une
liberté assez relative pour le culte vaudou.
Lien vers un portrait de Toussaint Louverture
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Autel vaudou associant des symboles chrétiens au "vévé"
traçé sur le sol |
Au début du 19e siècle, on trouvait dans toutes ces
îles et territoires, un Vaudou très particulier qui accentua
encore son caractère avec le temps. Depuis l'édiction du Code Noir
en 1685, l'évangélisation catholique, le baptême et la messe dominicale étaient imposés aux esclaves,
et le Vaudou leur était interdit. Ces obligations religieuses ont marqué leurs
comportements cultuels de plusieurs façons. L'aspect le plus
évident est l'appropriation d'une partie de l'iconographie
chrétienne. Associés aux "vévés", on trouve des croix, des
statues de saints et d'autres symboles dans les sanctuaires
vaudou d'Amérique. En réalité, ils masqueraient les "LOAS"
vaudou sous des apparences acceptables aux yeux des maîtres.
Par exemple et parmi les déités traditionnelles, Saint Pierre
pourrait représenter Legba, Saint Jacques serait Ogou, la Vierge
figurerait Erzulie, et Saint Côme et Saint Damien symboliseraient les Marassa,
les deux
jumeaux. En réalité, c'est beaucoup plus compliqué que cela.
La symbolique est plus subtile et beaucoup d'images ont été utilisées tant pour
les déités amenées d'Afrique que pour les esprits issus du continent
américain. Il y a aussi des évolutions conceptuelles
importantes, un Vaudou rouge et un Vaudou blanc. |
Les
"Jumeaux" vaudou et leurs représentations
haïtiennes
par les saints jumeaux chrétiens, St Côme et St Damien |
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En principe, les cérémonies
vaudous commencent ici par l'invocation du Grand-Maître divin. En Afrique,
cet esprit suprême ne reçoit aucun culte. Il est un Vodun ou un Orisha comme
ceux qu'il conduit. Il procéderait en fait des forces naturelles
dont il personnifierait la somme. En Amérique, c'est le Grand Dieu
chrétien qui est appelé. C'est lui qui régit les LOAS
de la nature qu'il peut mettre au service des hommes. Il y a donc là un renversement majeur des concepts
déterminant l'essence de la divinité souveraine. Mais, quoique l'Afrique soit devenue un peu mythique et
inaccessible, ses traditions mystiques ont été sauvegardées. Certains LOAS d'Haïti sont
donc des Voduns issus du
polythéisme Fon et Yorouba du Bénin ou du Dahomey.
Il faut y ajouter des déités "Zémès" héritées des
Amérindiens (Arawaks). Enfin, de nouveaux et nombreux
LOAS sont indigènes (ou créoles). Ils sont nés dans le nouveau milieu
ou de nouveaux ancêtres. Les LOAS de tradition africaine
ont un caractère assez bénéfique. Ils relèvent du culte "Rada". Les
nouveaux LOAS nés de
l’esclavage reçoivent un culte différents dit "Petro", et sont d'une
nature plus équivoque. Il y a aussi d'autres familles d'esprits
d'un genre plus sombre, tels les
GHEDES
et
EXU) .
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Loas vaudou
lien_détaillé |
Le rite Rada perpétue la tradition africaine
et l'aspect positif du culte dont il constitue la base. Son panthéon rassemble les
plus puissants LOAS. On y
trouve Damballah Wédo, génie du Ciel, du Soleil, de la Terre et de
la fécondité. Maître des eaux, ses symboles sont
la couleuvre et l'oeuf. Sa forme féminine (son épouse) est Aïda Wédo.
Alliés dans l'arc en ciel, ils procurent bonheur et
richesse. Papa Legba est le gardien des chemins.
Il ouvre les portes, y compris celles du monde
spirituel. Il est aussi le génie (mâle) de la fécondité et du
destin. Son épouse est Aïzan, protectrice des marchés. Sa vertu
est la pureté. Elle accorde la puissance à ses protégés et confère
la connaissance et le don de guérison aux houngans, les prêtres.
Erzulie-Freda est la grande divinité de la beauté et de
l'amour, symbolisée par la Vierge Marie. Ses protégés doivent
l'épouser. Agoué, époux d'Erzulie, est le génie de la mer et
protège les marins. Il y a aussi Ogou-Ferraille, patron des
forgerons et génie de la guerre. Loko-Atisou, l'esprit de la
végétation est guérisseur. Zaka protège les cultivateurs. Sogbo
maîtrise la foudre. Badère conduit le vent. On y ajoute le Baron-Samedi, avec
un statut particulier. Et il y a
beaucoup d'autres LOAS rada.
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Autel
vaudou
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Le Baron-Samedi (Baron-la-croix, Baron-Cimetière) est un
LOA
fort important. Il commande aux Guédés fossoyeurs, les génies de la
mort et du redevenir, et la Grande
Brigitte (Grann Brigitte) est son épouse. Portant habit noir,
haut de forme et bâton, il fume le cigare. Ses
célébrations ont souvent lieu dans les cimetières, et son
attribut symbolique est la croix. Le Baron appartient à la fois
aux cultes Rada et Petro (comme Sogou, Agoué et Loko).
Les doublons négatifs des LOAS RADA ambivalents ont un
attribut distinctif dans le culte Petro. Celui-ci rassemble les LOAS
haïtiens et ceux venus du Congo. On peut citer Don
Pedro, fondateur du rite, Ti Jean Petro, son fils, Petro-yeux-rouges,
le sorcier, Marinét-Bras-Séché, sa maîtresse,
Maître Grand-Bois, génie des plantes, Maloulou, maître du Feu, les
Taureaux, brutaux, Baron-Piquant, un Kita néfaste, Brisé,
guédé, Krabinay, violent, Zombi, guédé de la
chance, Makandal et Dessalines, esprits ancestraux liés à l'insurrection
haïtienne. Les loas congolais sont Kita, sorcier togolais, Bumba,
guédé, Bakoulou Baka, terrible, Mèt-Pamba, démon, Zandor,
congolais, Mondong-Moussai, tueur de chiens, Wangol,
angolais, Siniga, sénégalais,
Ossange, Simbi, etc.. Tous ces LOAS négatifs peuvent aussi adopter
et posséder les fidèles de leur choix.
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Vévé des LOAS Dambalah et Aïda - (protecteurs des
couples)
Rites Kongo, Nago, Petro, Rada - Icônes St Patrick et
Immaculée Conception.
Les deux serpents dans le Vévé représentent le couple Danmbala et
Aïda.
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