Arts et Sciences, Hommes et Dieux
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( Mise à jour de juillet 2017 )
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  Petit Manuel d’Humanité

CAHIER 10 - La Conscience et la Liberté.   

MANUSCRIT
ORIGINAL


 
N° 00035434
Tous droits
réservés

Table des Matières interactive.

La Conscience et la Liberté.
L'œuvre du Démiurge.
Un souffle d'âme.
L'illumination de René Guénon.
L'illumination de Victor Hugo.
L'illumination des Théosophes.
L'illumination de René Guénon.
L'illumination d'Albert Einstein.
L'illumination de Krisnamurti.
L'illumination de Van Rijckenborgh.
L'illumination du mouvement du Nouvel Âge.
Jésus, Dionysos, Osiris ou Krisna.
Le contact avec le Sacré.
Tout enseignement doit être dépassé.
La Rose par dessus l'épine.
Le fruit que j'ai engendré est le Soleil.
Isis.
Barre de navigation.
Les flèches vous ramènent ici, et le soleil au haut de la page,

La Conscience et la Liberté.

L’homme grand n’a plus de moi, car il a relié toutes les parties de son être
en une contemplation extatique de l’unité universelle. (Lao Tzu - Tao).


Ne pense pas au bien, ne pense pas au mal, mais regarde ce qu’est,
au moment présent, ta physionomie originelle,
celle que tu avais avant même d’être né. (Hui Neng - Philosophe Ch’an).


Tout commence dans une atmosphère de liberté par un acte d’invention,
Puis vient l’habitude, sorte de corps qui, comme le corps lui-même,
est un faisceau d’habitudes. (Pr. Edouard Leroy).

L'ŒUVRE DU DEMIURGE


 

 

Pour la plupart des hommes, à l'origine et à l’aboutissement de l’existence, il y a conceptuellement une entité inconnue, un grand être mystérieux, inconnaissable dont dérivent toutes choses. Il est l’alpha et l’oméga, le tout et le contraire de tout, la chose créée et le vide créateur, le hasard et la nécessité, le temps qui court et l'éternité. Il ne peut être ni perçu, ni compris, ni décrit, ni représenté, ni limité, ni illimité dans ses attributs. Il est sans nom et sans visage. Il est le lieu de toutes les potentialités, la somme de tous les archétypes dans l’essentiel, et la somme de leurs manifestations dans l’existentiel, comme le conçoivent les philosophes anciens et modernes.

 

Les hommes ne peuvent donc prétendre le définir ni l’expérimenter globalement en aucune façon. Ils sont incapables de représenter mentalement cette immense potentialité mais ne peuvent ni penser ni communiquer à son sujet sans la désigner. Un mot est nécessaire mais il n’a ni contenu ni signification. Les scientifiques parleront du Vide originel et de son énergie oscillatoire. Dans notre référentiel habituel, les religieux le décriront souvent comme Père divin, mais d’autres civilisations l’appelleront tout aussi valablement la Mère universelle.

 

Ayant ainsi posé cette construction mentale sur la base d’une cause première, nous en poursuivons l’édification par l’ajout d’un acteur second qui la transforme en réalité effective. Un autre mot est nécessaire pour désigner le moteur conceptuel de cette transformation. Il est défini comme le Big Bang, l’énergie créatrice, le fabricant éclairé de toutes choses, la source de vie, le Verbe de Dieu, le grand architecte de l’univers, etc..  Dans la poursuite de l’élaboration conceptuelle, cette potentialité originelle se manifeste secondairement avec des caractéristiques dynamiques, immense fleuve de puissance et de forme se déversant dans la réalité créée.

Celui qui attend un cavalier doit prendre garde à ne point confondre
 le bruit des sabots et les battements de son cœur. (Proverbe chinois).

 

Il faut comprendre que ces divers concepts structurants sont des pièges posés par l’intellect. L’exécution du plan global de la manifestation créatrice originelle ne fonctionne  certainement pas comme le déroulement d’un projet issu d’un cerveau humain. La puissance formatrice nous semble s’exprimer en donnant existence à notre univers chaotique et fractal. Elle parait provoquer l’émergence des structures de la matière et de la vie, à partir des potentialités de la cause première, sans lien de causalité préalable avec quoi que ce soit. Il ne peut évidemment en être autrement puisque nous-mêmes avons postulé que tout était ainsi construit. La division arbitraire effectuée entre la cause première, le Père, ou le Vide originel, et sa manifestation actuelle, le Big Bang, ou le Verbe, est une opération spécifiquement humaine et purement mentale. En la pratiquant, nous cassons l’unicité globale de notre image conceptuelle initiale en opposant deux mots commodes auxquels nous ne pouvons cependant pas attacher de contenus figuratifs vraiment distincts.

 

La cause première et sa manifestation sont inséparables, ne pouvant être disjointes même intellectuellement. Dans un tel schéma humain et globalisant, toutes les créatures et leurs comportements, passés, présents, et à venir, sont issus de la cause première dans un acte de manifestation permanent. Nous avons ainsi pu dire que l’acte créateur, pur concept mental humain, nous paraissait primitivement manifesté par l’action contraignante de forces brutales faisant jaillir du chaos l’existence matérielle, l’immense cosmos galactique, la nature exubérante et la vie biologique.

 

Par référence à la culture antique, nous avons appelé Œuvre incomplète du Démiurge, autre expression commode mais tout aussi artificielle, cet état d’involution de l’être, impliqué dans la matière. Ces forces imposées n’ouvrent guère vers des comportements libres et autonomes. Cependant, parce qu’elles aboutissent aujourd’hui à l’éveil de la conscience et à l’ouverture d’un nouveau regard posé par l’Homme sur la lumineuse réalité de l’être total, nous les avons appelées forces lucifériennes, (c’est à dire porteuses de lumière).

 

Nous avons aussi posé que le même acte créateur semblait simultanément se manifester de façon différente par l’apport de la révélation personnelle, de la grâce spirituelle, dans un accès intuitif à l’intelligence cosmique, et par la capacité à réaliser un acte libre et volontaire. Usant de la même référence aux usages hérités de l’antiquité, nous avons décrit ce facteur second comme la surrection de la vie de l’Esprit jaillissant de la conscience. Pour parler de cet autre acteur de manifestation, non pas contraignant ni imposé, mais proposé, le mot  force ne convenait pas car il portait des connotations de contraintes.

 

Parce que notre Monde occidental est de culture chrétienne, nous avons antérieurement appelé élan christique cet afflux de grâce, (sachant bien que dans un autre référentiel culturel, on userait d’un vocabulaire différent). Sa puissance est un moteur d’évolution favorisant une émergence, une progression de l’être dans la transcendance. La manifestation de cette autre puissance n’est pas subordonnée ni consécutive à la manifestation des forces lucifériennes. C’est un autre mode de la manifestation originelle qui élabore des propriétés différentes, caractérisant un aspect immatériel, du Monde. Il n’ouvre plus vers l’involution, qui est un enfermement forcé de l’être dans la matière.

 

Cet Esprit est également un pur concept humain par lequel nous convenons de décrire mentalement un autre état permanent de la manifestation globale. Cet état différent devient maintenant accessible à la conscience humaine. Dans l’absolu mystérieux du Grand Tout inconnaissable, il est la forme intellectuelle actuelle et consciente que nous donnons, à l’instant même, à l’attouchement et à l’appel du facteur second.

 

Cette prise de conscience est importante. Les hommes épris de religiosité disent qu’elle constitue un lien, un échange entre notre humaine personne et la divinité. Pour eux, cette réponse est donc sacramentelle et transcendante. Elle est sacramentelle parce qu’elle établit une rencontre de deux convergences, d’une part la démarche ascendante de l’Homme vers la Déité, d’autre part, l’attouchement descendant de la Déité appelant l’Homme à Elle. Elle est transcendante parce qu’elle transforme notre nature terrestre ordinaire pour l’adapter au niveau divin. Vous voyez que nous abordons maintenant des questions difficiles, mais il reste quelques éléments à prendre en compte.

UN SOUFFLE D'ÂME.

Je vous propose donc de souffler et méditer un peu, avant de jeter quelques regards sur notre propre temps. Arrêter-vous d’abord un instant dans la fraîcheur du jardin étincelant d’Eden, en Archaos, dont vous avez un extrait ci-dessous. Un roman libertin ! Peut-être, mais aussi bien autre chose ! Avec vos jambes, ou vos pieds, vous allez où vous voulez. Et puis c’est tellement joliment écrit !

Ils n’avaient pas le temps.
Eh bien si tu n’as pas le temps, on te le retirera.
Et si tu as le temps, on te donnera l’éternité.
Viens en nous. Écoute. Silence.
Alors l’Ange a abaissé son épée.
Entrez, enivrez-vous d’amour
et baignez-vous dans la beauté du Monde.

( Christiane Rochefort - Archaos ou le Jardin Étincelant).

Dans les précédents développements, nous avons vu que beaucoup d’autres hommes, en d’autres temps et d’autres lieux, ont élaboré des concepts variés pour expliquer l’origine universelle.

 Toutes les sciences et toutes les religions font de même.
Elles usent de la liberté humaine pour exposer une vérité relative.

A partir des révélations partielles qu’ils reçoivent, les hommes construisent des théories, c’est à dire des représentations transmissibles de leurs perceptions de la Globalité, et ils ont la ferme volonté de les transmettre. Comprenez bien qu’il soit tout à fait possible et légitime pour chaque homme, en son lieu et en son temps, en réponse à son appel intérieur ou en accord intime avec sa révélation personnelle, de concevoir ses propres représentations. Il les affirme véritables, en accord avec sa propre conviction, sans mettre en cause la relativité de cette vérité.

Cette attitude est tout aussi fréquente et légitime en matière religieuse et philosophique que dans le domaine scientifique. Au contraire des modernes, les sociétés antiques ne séparaient pas nettement les diverses conceptions possibles du monde, scientifiques, philosophiques ou religieuses. Ainsi les anciens Grecs faisaient-ils naître du Chaos béant, les jumeaux Erèbe et Nuit, celle-ci s’ouvrant pour donner naissance au Ciel, Ouranos, et à la Terre, Gaïa, unis par l’Amour primordial, Éros.

D’autres doctrines disent que la force créatrice originelle se manifeste ici-bas de multiples façons, en plusieurs épisodes successifs, d’abord en produisant l’existence hors du vide, (la béance chaotique originelle), puis la matière à partir de l’existence, puis le cosmos de la matière, puis la vie du cosmos, puis le mental de la vie, puis la conscience du mental, puis l’esprit de la conscience. C’est approximativement ce que nous dit la science, en utilisant son vocabulaire spécifique.

On pourrait, tout aussi bien, donner des noms propres évocateurs à ces manifestations successivement dérivées les unes des autres, et leur faire correspondre des images symboliques ou des personnifications. Beaucoup de religions antiques et modernes ont adopté cette façon. C’est ainsi que certaines écoles gnostiques ont imaginé des entités, les Éons, émises successivement par la divinité. La plus récente, Sophia, symbolisant l’humanité déchue, se rendit coupable d’une transgression qui entraîna la chute des hommes. Ces antiques traditions ne sont pas perdues ni tombées dans l’oubli. Des groupes de chercheurs s’efforcent toujours de nous les transmettre en dépit de l’obstruction des églises et des pouvoirs en place.

Nous avons tous une connaissance plus ou moins approfondie des fondements de la culture chrétienne et de ses rapports passés, parfois difficiles, avec la science. Nous n’y reviendrons pas en détail ici, mais cela ne veut pas dire que la question ne mérite aucun approfondissement concernant son évolution actuelle. Il parait cependant plus intéressant de voir, en particulier, ce qu’est devenue, au fil du temps, sa grande et antique rivale, la Gnose. Une plus large connaissance de la grande richesse des illuminations qui ont éclairé les derniers siècles nous donne davantage de tolérance et de liberté. Dans cet esprit d’ouverture, nous examinerons quelques démarches modernes, réponses récentes, différentes et souvent gnostiques à l’appel de l’Esprit.

De nouveaux mythes cosmogoniques et théogoniques ont été élaborés par des penseurs du début du siècle éclairés à la fois par leur lumière intérieure, leur propre Gnose, et par l’évolution des découvertes et des théories scientifiques. Leurs recherches ont marqué notre société jusqu’à la seconde guerre mondiale.

La richesse du fondement commun et la profondeur des idées que portaient ces hommes ont parfois pris des formes relativement doctrinales. Il faut prendre un peu de hauteur pour aborder les enseignements correspondants qui ont été élaborés et publiés depuis la fin du 19ème jusqu’en 1950. Inspirés par l’ésotérisme antique et par le contact renouvelé avec l’Orient, ils sont marqués par le spiritisme, alors très en vogue, par les pressions sociales de l’époque et par le contact avec l’Orient. On y trouve un recours au vieux symbolisme kabbalistique des nombres avec des niveaux d’organisation ternaires ou septénaires imbriqués les uns dans les autres, ou la considération des aspects astrologiques traditionnels.

Leurs idées  reflètent également le niveau alors atteint par les sciences expérimentales et les hypothèses nouvelles concernant la structure du cosmos, et on y évoque les galaxies gigantesques peuplant en nombre illimité l’immensité de l’univers. Ces théories métaphysiques reflètent une conception rigoureusement ordonnée et très hiérarchisée du cosmos qui correspondait aux idéaux du début du siècle. Dans l’époque actuelle, et sous l’influence de la nouvelle pensée scientifique, nous privilégions plutôt des conceptions floues et aléatoires, basées sur des évolutions plus chaotiques. Dans les deux aspects de cette étude, on mesure la rapidité des modifications conceptuelles au cours d’une période d’une  cinquantaine d’années. On comprend bien mieux alors la nécessité de réactualiser fréquemment la formulation des messages invitant à la recherche d’une meilleure connaissance.

 Arrêtons-nous d’abord sur une parole de Lord Bulwer-Lytton, (dans Zanoni), rapportée par Helena Petrona von Rottenstern Hahn qui fonda la Société Théosophique, (mouvement ésotérique qui eut son temps de gloire avant la guerre de 1914). Elle était plus connue sous son nom de femme, Mme Blavatsky. et rappelle cette pensée dans son livre, Isis dévoilée, écrit en 1877.

 Le miroir de l’âme ne peut refléter en même temps la terre
et le ciel et l’un s’efface dés que l’autre s’y montre.
(Zanoni).

Nous sommes confrontés à ce problème, vous et moi, dans notre propre recherche. Nous vivons existentiellement aujourd’hui, sur cette terre dense que notre raison tente scientifiquement d’expliquer. Nous accédons aussi, essentiellement et éternellement, dans un autre plan que nous abordons seulement par la révélation ou l’intuition. Aussi longtemps que nous n’arrivons pas à saisir, à la fois, dans le miroir étroit de notre conscience, ces deux reflets du ciel et de la terre, le chemin difficile qui les relie nous reste fermé. Il est donc nécessaire d’explorer simultanément et méticuleusement les deux territoires, expressions duale d’une unique réalité, en établissant des ponts conceptuels chaque fois qu’il apparaît possible d'en relier les deux rives.

Avant de conclure ce livre, je voudrais partager avec vous quelques travaux d'hommes qui ont éperdument cherché à combler leur immense manque d'absolu. Dans cette relation, je ne porterai aucun jugement de valeur. Dans sa recherche de l'Esprit ou la Connaissance, chacun a utilisé ce qu'il possédait et ce qu'il a pu recevoir avec son intelligence mais aussi avec son intuition et peut être son contact avec une autre réalité immatérielle. Utilisant ces matériaux, dans son temps, sa culture, son milieu, son état d'âme, son ouverture spirituelle, il a construit son Temple personnel, sa Révélation, son Illumination, dans la forme qu'il croyait la plus adéquate à sa communication.

Je ne saurai classer telle sincérité par rapport à telle autre. Si vous avez besoin de les hiérarchiser, il vous appartient de le faire en fonction de vos propres critères, de votre intime sensibilité, et du genre de nourriture qu'attend votre être intérieur. Pour ma part, j'essaierai de transmettre ces clartés par ordre chronologique d'apparition et aussi fidèlement que possible. 

L'ILLUMINATION DE VICTOR HUGO

Aux temps romantiques, Victor Hugo n'élabore pas de doctrine  mais parle à la sensibilité des lecteurs. Chronologiquement, le poète se situe entre les Kabbalistes du 19ème et les Théosophes. A la fin de sa vie, Hugo se penche longuement sur la sombre histoire de la lutte de Dieu et du Diable, de la chute et du salut des hommes. Cette œuvre poétique  inachevée n’a pas été publiée de son vivant, mais, après sa mort, en 1885, son éditeur en forma un ensemble inédit un peu confus. Cette dispersion et cette ampleur rendent difficile l'approche de l’apport spiritualiste de Hugo. Le pathétique y coule comme un fleuve, et il faut parfois orpailler longtemps dans ses eaux tumultueuses, mais on y trouve alors des diamants. Ces fragments comptent environ quarante mille vers. Un quart concernent notre sujet. Voici quelques extraits admirables et émouvants du mythe de l’ange Liberté secourant Satan. 

La fin de Satan.  (Et nox facta est).
 

(...) La chute du damné recommença - Terrible,
Sombre, et percé de trous lumineux comme un crible,
Le ciel plein de soleils s’éloignait, la clarté
Tremblait, et dans la nuit le grand précipité,
Nu, sinistre, et tiré par le poids de son crime,
Tombait, et comme un coin sa tête ouvrait l’abîme.
Plus bas ! plus bas! toujours plus bas ! (...).

Je veux le torturer dans son œuvre, et l’entendre
Râler dans la justice et la pudeur à vendre,
Dans les champs que la guerre accable de ses bonds,
Dans les peuples livrés aux tyrans, dans les bons
Et dans les saints, dans l’âme humaine toute entière!
Je veux qu’il se débatte, esprit, sous la matière ;
Qu’il saigne dans le juste assassiné; je veux
Qu’il se torde, couvert de prêtres monstrueux; (...).
Encor si je pouvais dormir! Si seulement,
Une heure, une minute, un soupir, un moment,
Le temps qu’une onde passe au fond du lac sonore,
Fut-ce pour m’éveiller plus lamentable encore,
Sur n’importe quels durs et funèbres chevets,
Si je pouvais poser mon front, si je pouvais,
Nu, sur un bloc de bronze ou sur un tas de pierres,
L’une de l’autre, hélas, rapprocher mes paupières,
Et m’étendre, et sentir quelque chose de frais, (...).

Je souffre. Oh ! seulement un instant que je dorme !
Je l’aime d’être beau, moi qui suis le difforme.
Que j’oublie un instant ! O souvenir ! Je vois
Les anges lui parler dans l’ombre à demi voix.
Que leur dit-il ? Je suis jaloux! Je me rappelle,
Qu’il me parlait aussi, que la lumière est belle.
Je l’aime d’être bon, moi qui suis le mauvais. (...).
Oh ! Je l’aime ! c’est là l’horreur, c’est là le feu !
Que vais-je devenir, abîmes, j’aime Dieu !
Je suis damné ! L’enfer, c’est l’absence éternelle.
C’est d’aimer. C’est de dire : Hélas ! Où donc est-elle,
Ma lumière ? Où donc est ma vie et ma clarté ? (...).

Cet être seul vivant, seul vrai, seul nécessaire,
Je vais m’en passer, moi, le colosse puni ! (...).
Comme je vais rugir sur lui ! Comme je vais,
Moi, l’affreux, face à face avec lui le suprême,
Le haïr, l’exécrer et l’abhorrer ! Je l’aime ! (...).
Si je ne l’aimais point, je ne souffrirais pas.
Or, prés des cieux, au bord du gouffre où rien ne change,
Une plume échappée à l’aile de l’archange
Était restée, et pure et blanche, frissonnait.
L’ange au front de qui l’aube éblouissante naît
La vit, la prit, et dit, l’œil sur le ciel sublime:
«  Seigneur, faut-il qu’elle aille, elle aussi, dans l’abîme ? ».
Dieu se tourna, par l’être et la vie absorbé,
Et dit - « Ne jetez pas ce qui n’est pas tombé ».(...).

Cette plume avait-elle une âme? Qui le sait,
Elle avait un aspect étrange; elle gisait,
Et rayonnait ; c’était de la clarté tombée.
Les anges la venaient voir à la dérobée.
Elle leur rappelait le grand Porte Flambeau ;
Ils l’admiraient, pensant à cet être si beau (...)
Tout à coup un rayon de l’œil prodigieux,
Qui fit le monde un jour, tomba sur elle.
Sous ce rayon, lueur douce et surnaturelle,
La plume tressaillit, brilla, vibra, grandit,
Prit une forme et fut vivante, et l’on eut dit
Un éblouissement qui devint une femme (...).

L’archange du Soleil, qu’un feu céleste dore,
Dit : De quel nom, faut-il nommer cet ange, ô Dieu ?
Alors, dans l’absolu qu’a l’Être pour milieu,
On entendit sortir des profondeurs du Verbe,
Ce mot, qui sur le front du jeune ange superbe,
Encor vague et flottant dans la vaste clarté,
Fit tout à coup éclore un astre : « Liberté ». (...).

Ô toi ! Je viens. Je pleure. Ici, dans les misères,
Dans le deuil, dans l’enfer où l’astre se perdit,
Je viens te demander une grâce, ô maudit !
Ici, je ne suis plus qu’une larme qui brille
Ce qui survit de toi, c’est moi. Je suis ta fille. (...).
Oh ! toute cette nuit, c’est affreux ! Père, père !
Quoi ! toi dans ce cachot ! Quoi ! toi dans ce repaire !
Toi puni, toi mauvais, toi, l’aîné des élus !
Te voilà donc si bas que Dieu ne te voit plus ! (...).

 Je viens à toi ! Je viens gémir, luire, éclairer,
T’ôter du moins le poids de la terrestre chaîne,
Et guérir à ton flanc la sombre plaie humaine.
« Mon père, écoute-moi. Pour baume et pour calmant,
Pour mêler quelque joie à ton accablement,
Tu n’as, jusqu’en cette heure, en ton âpre géhenne,
Essayé que la nuit, la vengeance et la haine;
Essaie enfin la vie, essaie enfin le jour, (...).

Laisse-moi mettre l’homme en liberté. Permets
Que je tende la main à l’univers qui sombre,
Laisse-moi renverser la montagne de l’ombre,
Laisse-moi jeter bas l’infâme tour du mal ! (...).
M’entends-tu sangloter dans ton cachot ? Consens
Que je sauve les bons, les purs, les innocents ;
Laisse s’envoler l’âme et finir la souffrance.
Dieu me fit Liberté, toi, fais-moi Délivrance ! (...).
L’ange le regardait, les mains jointes. Enfin
Une clarté qu’eut pu jeter un séraphin,
Sortit de ce grand front tout brûlé par la fièvre.
Ainsi que deux rochers qui se fendent, ses lèvres
S’écartèrent, un souffle orageux souleva
Son flanc terrible ; et l’ange entendit ce mot : « Va ! ». (...).

Oh ! l’essence de Dieu c’est d’aimer. L’homme croit
Que Dieu n’est comme lui qu’une âme, et qu’il s’isole
De l’univers, poussière immense qui s’envole;
Mais moi, l’ennemi triste et l’envieux moqueur,
Je le sais, Dieu n’est pas une âme, c’est un cœur.  (...).
Cent fois, cent fois, cent fois, j’en répète l’aveu,
J’aime ! Et Dieu me torture, et voici mon blasphème,
Voici ma frénésie et mon hurlement; j’aime !
J’aime à en faire trembler les cieux ! Quoi, c’est en vain ! (...).
Ô misère sans fond ! Écoutez ceci, sphères,
Étoiles, firmaments, ô vieux soleils, mes frères,
Vers qui monte en pleurant mon douloureux souhait,
Cieux, azurs, profondeurs, splendeurs, « L’amour me hait ! ».

«  Non je ne te hais point ! »
« Un ange est entre nous. Ce qu’elle a fait te compte.
L’homme, enchaîné par toi, par elle est délivré.
Ô Satan, tu peux dire, à présent : Je vivrai !
Viens; la prison détruite abolit la géhenne !
Viens; l’ange Liberté, c’est ta fille et la mienne.
Cette paternité sublime nous unit.
L’archange ressuscite et le démon finit,
Et j’efface la nuit sinistre, et rien n’en reste.
Satan est mort. Renais, ô Lucifer céleste ! ».
 

Les idées religieuses d’Hugo s'approchent de celles d’Origène. Ses écrits témoignent évidemment d’un gnosticisme chrétien cependant résolument unitariste. Le poète croit à la clémence de Dieu et à la repentance finale de Satan, mais il reste farouchement anticlérical et ennemi des religions établies. 

Toute religion, homme, est un exemplaire,
De l’impuissance ayant pour appui la colère.
Toute religion est un avortement
Du rêve humain devant l’être et le firmament.

(V. Hugo - Philosophie).

Dieu, dit Hugo, fit l’homme à sa ressemblance et lui donna la liberté. Dans le mythe hugolien, la Liberté est l’ange reliant Dieu et Satan. Elle est, par grâce, la parcelle de lumière épargné dans la chute et l’ultime semence de salut.

L'ILLUMINATION DES THÉOSOPHES

Voyons maintenant des thèses théosophiques plus récentes, et commençons par un personnage considérable, Rudolf Steiner, dont l’œuvre fut liée à celle de Mme Blavatsky. Ce penseur autrichien est né en 1861. Étudiant à Vienne, docteur en philosophie, diplômé en diverses sciences, il est marqué par les aspects scientifiques de l’œuvre de Goethe. (Il fonde d’ailleurs ultérieurement le Goethorium prés de Bâle). Steiner veut ouvrir un chemin de connaissance vers la spiritualité universelle, la Gnose. Il dirige un magazine littéraire, et fonde, avec Marie de Rivers, un journal Lucifer et Gnosis. Il commence à publier, inspiré par Goethe et par l’hermétisme des Rose-Croix. La Société Théosophique de Berlin l’invite à donner des conférences et lui fait rencontrer Annie Besant, sa nouvelle présidente. Steiner est remarqué et nommé en 1905 secrétaire général de la section allemande.

Il affirme que l’Homme, (l’Être originel), est plus ancien que tous les autres vivants sur Terre. L’Homme se serait détaché d’un grand être cosmique originel dont il demeure pourtant une particule microcosme portant en elle l’univers dans sa totalité. Steiner professe que les problèmes essentiels ne peuvent être résolus tant que l’on demeure réfractaire à la connaissance des mondes suprasensibles. Il accepte de rénover le Christianisme sous l’éclairage du Bouddhisme, mais refuse de suivre Annie Besant, dans ses critiques à l’égard de Jésus, ses convictions spirites, et ses recherches des réincarnations hindoues du Christ et de Bouddha. Lorsque Krisnamurti est présenté officiellement comme leur dernière réincarnation, Steiner se sépare des Théosophes et fonde sa propre doctrine, l’Anthroposophie.

L’Homme ordinaire ayant perdu la connaissance de son rôle originel, cette philosophie doit la lui rendre pour l’aider à reprendre sa véritable place au sein du Cosmos. Elle se propose de l’éduquer et de le guérir, d’harmoniser en lui l’être matériel (ou corps physique) et l’être spirituel intérieur, en développant le don du cœur qui permet d’équilibrer les contraires.

L’Anthroposophie voit dans le Christ le centre véritable de l’histoire terrestre. Rudolf Steiner exerce une profonde influence par le rayonnement de sa personnalité et l’enseignement de sa pensée qui fait de nombreux adeptes. La doctrine a des prolongements dans la fondation de plusieurs écoles. Steiner publie une centaine d’ouvrages et prononce plus de six mille conférences écrites. Il professe l’existence d’un univers invisible et de mondes suprasensibles, une forme de réincarnation et l’existence de rythmes cosmiques auxquels l’Homme est relié.

L’expérience mystique permet de retrouver en soi la présence du divin. L’homme possède trois natures, le corps physique, le corps astral, et l’esprit. Steiner assure que le corps astral est perceptible par le clairvoyant, et qu’il dispose d’organes subtils, ou chakras, en forme de roues ou de fleurs. La morale des adeptes repose sur cinq principes essentiels, la maîtrise des pensées, le pouvoir sur la volonté, l’égalité d’âme devant plaisir ou douleur, la positivité dans les jugements, et l’absence de prévention dans les conceptions de l’existence. Pour approfondir un peu la pensée de Steiner, nous analyserons quelques aspects de l’un de ses livres. La Chronique de l’Akasha, éditée en 1904, permet des rapprochements avec les œuvres d’Helena. Blavatsky et même avec Pythagore et Platon. Depuis 1899, Steiner était associé aux recherches des Théosophes. Avant d’aborder son œuvre, il est nécessaire de définir quelques fondements de sa pensée afin d’éviter une incompréhension des idées et des concepts exposés.

Les Théosophes travaillent à la résolution du problème fondamental « Comment peut-on s’élever à la connaissance des mondes supérieurs ». Ils pensent le résoudre par une « cosmologie anthroposophique », étude de l’univers fondée sur la prééminence de l’Homme. Dans cette approche l’Homme n’est absolument pas une créature biologique habitant une petite planète perdue aux confins de l’espace. Les Théosophes le situent sur plusieurs plans universels imbriqués les uns dans les autres. Ils lui donnent une dimension divine immense. Ils l’associent au Logos créateur, et lui attribuent une importance cosmique fondamentale.

  •  Lorsque les Théosophes, et Steiner, parlent de la Terre, il ne s’agit donc pas de notre planète physique actuelle. Celle-ci n’est pour lui qu’un monde de secours accessoire, un avatar actuel de la demeure éternelle de l’Homme. La Terre de Steiner, c’est généralement le Monde Primordial, demeure de l’Adam Kadmon, manifestation divine originelle.

  • L’Homme, c’est donc cet Adam primordial éternel, qui existait sur un autre plan avant même que n’existe la Terre. Il a évolué d’un état originel subtil inconscient vers l’état biologique conscient. Sa nature s’est transformée progressivement, tandis que le Monde Primordial évoluait simultanément, de l’état éthérique subtil initial vers l’état matériel dense actuel.

  • C’est au cours de cette évolution, que l’Adam primordial a perdu la connaissance de son rôle véritable. Le Monde actuel est un ordre de secours mise en place par les Puissances Christiques supérieures pour lui permettre de regagner sa place au sein du cosmos. Dans l’histoire de l’évolution, on distingue plusieurs époques pendant lesquelles l’Homme Adam revêt des natures puis des formes différentes de ce qu’il est aujourd’hui. Steiner les décrit en utilisant le mot race auquel il donne un sens particulier, désignant ainsi un stade évolutif caractérisé. Il distingue  les races mères, porteuses des caractères déterminants, et les sous races, porteuses des potentiels évolutifs qui vont permettre l’émergence des caractères nouveaux.

  • Dans son modèle, Steiner adopte le système septénaire utilisé par les anciens ésotéristes. Au cours de son histoire, l’Homme Adam revêt sept états d’être différents dans sept races mères successives. Pendant son évolution, le Monde, qui n’est pas encore notre Terre actuelle mais son germe astral, subtil et fluide, connaît une série de transformations dans une  densification progressive, au fur et à mesure qu’Adam Kadmon prend une conscience croissante de son état biologique et de la nature de la matière.

Adam originel (Kadmon) est défini comme le maître du Monde dont la nature et les formes lui sont subordonnées. De son évolution découle celle du cosmos. Rudolf Steiner expose donc l’évolution de l’Homme essentiel en tant que fondement du Monde. Il explique la formation et l’état du second par le premier, en partant de ce plan essentiel originel. Il montre ensuite les conséquences existentielles de la transformation des états de conscience du Kadmon originel. Il faut donc bien comprendre que l’on travaille ici sur l’Essentiel céleste dont l’Existentiel terrestre n’est que la manifestation. Dans cette théorie, lorsque l’Homme commença à lier son destin à celui de la planète « Terre », il avait déjà parcouru plusieurs étapes de son évolution, se préparant ainsi à l’existence terrestre. Rudolf Steiner choisit de désigner ces trois périodes préparatoires sous les vocables de saturnienne, solaire, et lunaire, qui n’ont rien à voir avec les corps célestes ainsi nommés.

Dans l’humanité, les différentes périodes de la vie se succèdent mais aussi coexistent. Le vieillard, l’adulte, l’adolescent, l’enfant, existent en même temps, côte à côte. Il en est de même pour les différents degrés de conscience des êtres éternels en évolution. Dés le début d’une nouvelle période de vie, il existe à la fois des êtres possédant des états de conscience relativement obscurs mais aussi d’autres êtres qui ont déjà acquis des degrés supérieurs. Les degrés les plus élevés poursuivent dorénavant leur évolution dans des sphères situées au-delà du règne humain. D’autres êtres sont encore assez proches pour participer à notre développement et apporter leur contribution à notre progression. Cette assistance amicale est réalisée au cours de cycles successifs aboutissant à la mise en place des germes ou rudiments des futurs moyens dont disposeront les humains. Ainsi, pour exemple, durant le premier cycle de Saturne, les Esprits de Volonté ont donné au projet Homme un vague corps de substance, germe de son futur corps physique. Sept cycles successifs vont se dérouler pendant lesquels les entités vont perfectionner leur travail.

Voyons maintenant l’importance que Rudolf Steiner donnait aux rapprochements entre les données fournies par la science expérimentale et celles transmises par la science occulte traditionnelle.

Notre connaissance de la nature, conduit à représenter l’origine des choses. Mais sans l’approfondissement auquel conduit la science occulte, ces représentations ne seront toujours que des vues caricaturales. (...).

Une compréhension juste des vérités de la science spirituelle apporte à l’homme une base d’existence véridique. Elle lui permet de découvrir sa valeur, sa dignité, son identité, et lui donne le maximum de courage pour affronter la vie. Car ces vérités l’éclairent sur ses rapports avec le monde alentour et lui désignent ses buts les plus élevés, sa vraie destination. Elles le font en rapport avec les exigences de notre époque, si bien qu’il n’a pas besoin de succomber à l’antagonisme qui oppose croyance et savoir.

 On peut être à la fois homme de science moderne et investigateur spirituel,
mais dans ce cas, il faut être authentiquement l’un et l’autre.

Max Heindel prend la suite de Rudolf Steiner, et publie en 1922, la Cosmogonie des Rose-Croix. Dans son approche cosmogonique, Max Heindel considère un immense plan dont la particularité remarquable est l’association d’aspects métaphysiques, révélés ou conceptuels, et d’aspects actuels, donc expérimentaux. La réalité ultime s’étend sur sept plans cosmiques concentriques.

Nous ne savons rien des six plans supérieurs qui sont le champ d’activité des Grandes Hiérarchies. Au niveau du premier de ces plans supérieurs, Max Heindel place l’Être Suprême, détenteur du pouvoir total, d’où sont sortis le Verbe, (le Mouvement), et les sept grands Logoï qui en procèdent et qui contiennent en eux toutes les hiérarchies différenciées dans les différents plans inférieurs. Les Hommes sont dans le septième plan cosmique, où règnent les dieux de notre système solaire et des autres soleils, qui existent en nombre immense dans l’espace cosmique. Ces dieux sont des Grands Êtres, triples dans leurs manifestations. Leurs trois aspects sont la Volonté, la Sagesse, et l’Activité.

De notre propre dieu solaire procèdent sept Esprits Planétaires, qui sont chargés chacun de l’évolution de la vie sur sa propre planète, et qui sont également trinitaires. Ils se différencient eux-mêmes en Hiérarchies Créatrices qui passent par une évolution septénaire. L’évolution que dirige chacun des Esprits Planétaires diffère de celle développée par chacun des autres.

Au commencement d’une période de manifestation, le Grand Être, (que nous connaissons ici sous le nom de Dieu ), prend en charge une certaine portion de l’espace dans laquelle Il crée un nouveau système solaire par l’évolution et l’expansion de sa propre conscience. Il renferme en lui, d’une part, des légions de hiérarchies qui sont le fruit de ses manifestations précédentes, et d’autre part, d’autres intelligences d’un niveau de développement graduellement décroissant, jusque et y compris celles qui n’ont pas encore atteint un degré comparable à celui de l’actuelle humanité. Elles n’arriveront donc pas à parfaire leur évolution dans notre propre système, nouvellement créé.

Pendant la période de manifestation, toutes ces hiérarchies et catégories d’êtres, ces vagues de vie, travaillent afin d’augmenter leur expérience. Les plus développés aident les moins avancées en éveillant chez elles un état de soi-conscience qui doit leur permettre de travailler pour leur propre compte. Il n’y a pas de processus instantané dans la nature. Tout se passe avec lenteur et certains doivent donc attendre que ceux qui les précédent aient préparé les conditions nécessaires à leur développement.

 Chaque chose atteindra finalement l’ultime perfection.

La période consacrée à l’éveil de la conscience et à la construction des véhicules pour la manifestation de l’Esprit dans l’Homme est l’Involution. La période suivante, où l’être humain développe sa conscience en omniscience divine, est l’Évolution.

Les désignations des périodes d’évolution sont plus claires chez Max Heindel, que chez Steiner, car il utilise aussi des couleurs pour représenter plus clairement les conditions par lesquelles notre globe a passé, passe maintenant, et passera dans le futur. Nous avons déjà traversé les périodes de Saturne, violet, Soleil, indigo, et Lune, bleu. Nous sommes dans la période verte (martienne), de la Terre. Puis notre globe passera, avec nous, par les conditions de la période jaune ou mercurienne de la Terre, puis les périodes de Jupiter, orange, de Vénus, rouge, et de Vulcain, blanc.

L'ILLUMINATION DE RENÉ GUÉNON

Les Théosophes ont alors un ennemi déclaré en la personne de René Guénon qui traite en 1909 de l’origine du mal. Il considère que leur ésotérie n’est ni orientale ni traditionnelle. Il publie abondamment, depuis 1909, (date de son premier essai, Le Démiurge, et de la fondation de sa revue La Gnose, jusqu’en 1950). Son approche métaphysique est empreinte à la fois d’une logique draconienne, et d’une foi profonde en l’unité du Monde. Sa première recherche porte sur le Bien et le Mal. Ceux qui considèrent la création comme l’œuvre directe de Dieu sont obligés, dit-il, de le rendre également responsable du Bien et du Mal. Si les créatures comme l’Homme peuvent ainsi choisir, c’est que l’un et l’autre existent déjà, du moins en principe. Si elles peuvent choisir le Mal, c’est qu’elles sont imparfaites.

Un Dieu parfait pourrait-il créer des êtres imparfaits. Le Parfait ne peut engendrer l’imparfait car il devrait contenir en lui-même l’imparfait, au moins à l’état principiel et ne serait plus le Parfait. L’imparfait ne peut pas résulter d’une émanation du Parfait. L’imparfait ne pourrait donc résulter que d’une création à partir du néant. Il faudrait pour cela admettre qu’il puisse exister un néant, c’est-à-dire une chose qui n’ait pas de principe. Or, dit Guénon, il ne peut rien y avoir qui n’ait pas de principe. Mais quel principe? N’y a-t-il qu’un principe unique de toutes choses. Lorsque l’on envisage le Tout, l’univers total, il est évident qu’il contient toutes choses, sinon il ne serait pas le Tout. Ce Tout est nécessairement illimité et infini, car ce qui serait au-delà de ses limites ne serait pas compris dans le Tout. Cet infini qui contient tout est le principe de toutes choses et il est nécessairement UN. Deux infinis non identiques s’excluraient l’un l’autre. Il y a donc un principe unique de toutes choses, et ce Principe est le Parfait, car l’infini ne peut être tel qu’il est que s’il est le Parfait. Ainsi le Parfait est la Cause Première qui contient toutes choses en puissance et a produit toutes choses.

Peut-on concevoir comment cette Unité, principe unique de toutes choses, a pu produire la Dualité avec toutes les oppositions envisagées dans le monde, l’Être et le Non-Être, l’Esprit et la Matière, le Bien et le Mal, et autres. Il nous faut bien écarter l’hypothèse de deux principes distincts opposés l’un à l’autre. Ils ne pourraient être tous les deux infinis car ils s’excluraient mutuellement ou se confondraient, en étant chacun le principe de l’autre. Ils ne peuvent pas non plus être finis car ils ne seraient plus des principes véritables, rien de fini ne pouvant exister par soi-même ni provenir de rien. Par conséquent, procédant d’un principe commun, la Dualité ne peut donc exister par elle-même.

La Dualité est produite par l’Unité.

Pour comprendre comment cela se produit nécessairement, il faut d’abord envisager l’opposition fondamentale de l’Être et du Non-Être. Cette opposition est seulement une apparence, une simple distinction. Est-elle pour autant une réalité indépendante en soi, ou bien le seul résultat de notre façon purement humaine de considérer les choses ? Excluant le Non-Être en tant que pur néant, dont rien ne pourrait  être dit, on ne peut l’envisager que comme la possibilité d’être. L’Être est donc la manifestation du Non-Être. Il est contenu potentiellement dans celui-ci. « Le rapport du Non-Être à l’Être est alors le rapport du non-manifesté au manifesté, et l’on peut dire que le non-manifesté est supérieur au manifesté dont il est le principe, puisqu’il contient en puissance tout le manifesté plus tout ce qui ne l’est pas, n’a jamais été et ne sera jamais manifesté ».

Le manifesté étant contenu en principe dans le non-manifesté, il n’y a pas de distinction réelle entre les deux champs. Cependant, l’Homme ne peut concevoir le non-manifesté qu’à travers la manifestation. Il en résulte que la distinction existe pour nous, mais elle n’existe que pour nous. En réalité, l’Imparfait n’existe pas. Il est un fragment du Grand Tout et ne peut exister que comme élément constitutif du Parfait. Ce que nous appelons erreur n’est donc que vérité relative. Toutes les erreurs sont également des fragments contenus dans la Vérité Totale. Il en est de même pour les  distinctions que nous effectuons entre les  aspects secondaires de la Dualité.

Il est donc illusoire de distinguer l’Esprit de la Matière ou le Bien du Mal, car ces distinctions n’existent que pour nous. Du point de vue absolu, le Mal n’existe pas. Si l’on appelle Bien le Parfait, son relatif, le Mal, n’en est pas réellement distinct, étant contenu, en principe, dans le Parfait. Le Mal existe seulement si l’on considère toutes choses sous un aspect fragmentaire, en les séparant de leur commun Principe. C’est ainsi qu’est créé l’Imparfait par cette distinction même. S’il n’y a pas de Mal, on ne peut parler du Bien, mais seulement de la Perfection. En distinguant le Mal du Bien, on les crée tous les deux. Ils ne sont réels que si on les oppose l’un à l’autre.

Cette conception permet de comprendre le symbole de la chute originelle. La fragmentation du Verbe, de la Vérité Totale, est identique à la fragmentation de l’Adam Kadmon originel dont les parcelles séparées constituent l’Adam Protoplastes, (Premier Formateur). La fragmentation est causée par l’égoïsme qui est désir d’existence individuelle. Ce désir est d’abord intérieur, à l’état potentiel dans l’Homme. Il devient extérieur quand l’Homme l’extériorise. L’instinct de division pousse l’Homme à goûter les fruits de l’arbre de la connaissance, à créer la distinction du Bien et du Mal. Ses yeux s’ouvrent par suite de la séparation qu’il a effectuée entre les formes des êtres. C’est en cela qu’il est le Premier Formateur. Mais il se trouve alors, lui aussi, soumis aux conditions de l’existence individuelle. Dorénavant, il est revêtu d’une forme, la tunique de peau de la Bible. 

En réalité le Démiurge n’est pas une puissance extérieure. Dans le principe, il est seulement la volonté de l’Homme qui réalise en lui-même la séparation du Bien et du Mal. L’Homme individuel, limité ensuite par cette volonté qui est pourtant la sienne propre, la considère comme quelque chose d’extérieur à lui. En cela, il la rend distincte. Comme elle s’oppose aux efforts qu’il fait pour sortir de ce domaine où il s’est enfermé lui-même, il la regarde comme une puissance hostile qu’il appelle Adversaire ou Satan. « Cet adversaire que nous créons en nous-mêmes, à chaque instant, n’est cependant pas mauvais en soi. Il est seulement l’ensemble de tout ce qui nous est contraire ».

Le Démiurge, devenu une puissance distincte, n’est ni bon ni mauvais, mais il est en réalité l’un et l’autre puisqu’il contient en lui-même la Bien et le Mal. On considère son domaine comme un Monde inférieur s’opposant au Monde supérieur ou Univers Principiel dont il a été séparé, mais cette séparation n’est réelle que dans la mesure où nous la réalisons car le Monde inférieur est contenu à l’état potentiel dans l’Univers Principiel Total, le Grand Tout.

Le Démiurge ne peut donc s’opposer à Adam Kadmon, l’Humanité principielle, manifestation véritable du Verbe, que comme un simple reflet, car il n’est pas émanation et il n’existe pas par lui-même. Nous devons considérer le Démiurge non pas comme un être mais comme un reflet ténébreux et inversé de l’Être. Il peut être envisagé comme la collectivité des êtres dans la mesure où ils ont une existence individuelle. Nous sommes des êtres distincts en créant nous-mêmes une distinction qui n’existe que quand nous la créons. Nous sommes alors des éléments du Démiurge. En tant qu’êtres distincts nous appartenons donc au domaine du Démiurge.

 Le Démiurge est ce que l’on appelle la Création.

Puisque la création à partir du néant est impossible, il en résulte que tous les éléments de la Création sont donc contenus dans le Démiurge et tirés de lui-même. En réalité, le Démiurge et son domaine n’existent pas du point de vue universel, pas plus que n’existe la distinction du Bien et du Mal. De ce point de vue, la Matière n’est qu’illusion, ce qui ne permet pas de conclure que les êtres qui ont cette apparence n’existent pas. En fait, dit Guénon, si la Matière n’existe pas, la distinction entre Matière et Esprit disparaît. En réalité, tout est Esprit mais il faut cependant donner à ce mot un sens tout différent de celui qu’on lui attribue en philosophie.

Que ce soit en pensée ou autrement, c’est toujours en opposition à la Matière, par la différence de forme qu’on veut le définir, et alors il n’est plus l’Esprit.

Or, on ne peut définir l’Esprit. « En réalité, l’Esprit Universel est l’Être, et non tel ou tel être en particulier. Il est le Principe de tous les êtres, et ainsi il les contient tous. C’est pourquoi tout est Esprit. Lorsque l’Homme parvient à la connaissance réelle de cette vérité, il identifie lui-même et toutes choses à l’Esprit Universel, et toute distinction disparaît pour lui, de telle sorte qu’il contemple toutes choses comme étant en lui-même, et non plus comme extérieure à lui, car l’illusion s’évanouit devant la Vérité comme l’ombre devant le soleil. Ainsi, par cette connaissance même, l’Homme est affranchi des liens de la Matière et de l’existence individuelle ».

 « Il n’appartient plus à l’Empire du Démiurge ».

A ce premier niveau, Guénon pense avoir établi que, par la Gnose (ou connaissance), l’Homme peut s’affranchir du domaine de Démiurge, ou Monde Hylique, dès son existence terrestre. Les divers plans de l’Univers, ou Mondes, ne sont pas des lieux mais des états d’être. Un homme tout en vivant sur Terre peut donc appartenir en réalité non plus au Monde hylique (Matériel), mais au Monde psychique (Conscient), ou au Monde Pneumatique (Spirituel). Ce passage constitue une seconde naissance, mais seul le passage au plan dit pneumatique, l’incarnation de l’Esprit, délivre des naissances mortelles. Le Pneumatique est délivré de la forme. Il est dorénavant sans action. Contemplant toutes choses, il s’identifie à l’Esprit Universel. Il est Brahma, sans grandeur, sans étendue, incréé, incorruptible, sans figure, sans qualité, sans caractère. Tel est l’état auquel l’être parvient par la Gnose ou Connaissance Spirituelle, et ainsi il est libéré des conditions de l’existence individuelle, à tout jamais. C’est pourquoi Guenon dit qu’il est délivré de l’Empire du Démiurge.

A partir de son intérêt pour l’orientalisme, on comprend que Guénon ait pu être attiré par toutes les formes modernes de cette philosophie. Vers 1930, il devint musulman et s’en fut habiter au Caire où il était connu comme un grand Soûfi. Dans l’ésotérisme musulman du développement intérieur, ce terme désigne ceux qui ont fait le voyage et qui connaissent le but.

Évoquons ici, à ce propos, le mouvement des derviches tourneurs dont les rites paraissent fort étranges si l’on n’en comprend pas le symbolisme profond. Chez ces religieux musulmans vêtus de blanc pur, les acolytes tournent comme des toupies pour accumuler les énergies. Puis le maître entre dans la danse. Levant une main en coupe vers le ciel pour recueillir la grâce divine, il étend l’autre devant lui en offrande, répandant sa tournoyante bénédiction sur le Monde. Voir à ce sujet mon cahier N° 13.

L'ILLUMINATION D'ALBERT EINSTEIN

Einstein, israélite né en Allemagne en 1879, fut naturalisé Suisse en 1900. Professeur à l’Université de Berlin, passionné de physique théorique, il commença à faire connaître ses théories concernant l’équivalence masse énergie, les principes de la relativité des mouvements et les lois de la gravitation, à partir de 1916. Il reçut le prix Nobel en 1921. Einstein émigra aux États-Unis et prit la nationalité américaine en 1940. Il tenait une chaire à Princeton, (où naquit le mouvement de pensée dénommé Gnose de Princeton).

Ses recherches servirent de fondement à la mise au point des armes atomiques dont les conséquences l’horrifièrent. Il passa les dernières années de sa vie à condamner l’utilisation militaire de l’atome et à conseiller son contrôle international. Ses travaux concernant la physique eurent une influence absolument considérable. La philosophie contemporaine en fut également fortement marquée. Après Einstein, le concept théorique du progrès des sciences bascula dans le relativisme. La notion d’une nécessaire restructuration perpétuelle des principes directeurs de la connaissance fut substituée à celle de l’accumulation progressive des fragments immuables du savoir. Voyons ce que nous dit Einstein des relations établies entre la science et la religion.

Combien curieuse est la situation de nous autres, enfants de la terre ! Chacun est là pour une courte visite. Il ne sait pas pourquoi, mais il croit parfois le sentir. Mais on sait du point de vue de la vie journalière, sans réfléchir davantage, qu’on est là pour les autres hommes.(...). Chaque jour, je pense que ma vie intérieure et extérieure repose sur le travail des hommes vivants et sur celui des hommes déjà morts, que je dois m’efforcer de donner dans la même mesure que j’ai reçu et que je reçois encore.(...). Je ne crois pas du tout à la liberté de l’homme, dans le sens philosophique. Chacun agit non seulement sous la contrainte extérieure, mais aussi conformément à une nécessité intérieure.(...). Se préoccuper du sens ou du but de sa propre existence, ainsi que de celle des créatures en général, m’a toujours paru, au point de vue objectif, absurde. Cependant, tout homme a certains idéaux qui dirigent son effort et son jugement. Dans ce sens, le plaisir et le bonheur ne me sont jamais apparu comme une fin en soi. (J'appelle aussi cette base morale l’idéal du troupeau de cochons). Les idéaux qui brillaient devant moi et m’ont continuellement rempli d’un joyeux courage de vivre ont été le bien, la beauté et la vérité.(...).

La plus belle chose que nous puissions éprouver, c’est le coté mystérieux de la vie. Ce sentiment fondamental se trouve au berceau de l’art et de la science véritables. Celui qui ne le connaît pas et ne peut plus éprouver ni étonnement ni surprise, est pour ainsi dire mort et ses yeux sont éteints. L’expérience intime du mystérieux, même mêlé de crainte, a aussi créé la religion. Savoir qu’il existe quelque chose qui nous est impénétrable, connaître les manifestions de la raison la plus profonde et de la beauté la plus éclatante, qui ne sont accessibles à notre entendement que dans leurs formes les plus primitives, cette connaissance et ce sentiment constituent la vraie religiosité. C’est en ce sens, et seulement en ce sens, que j’appartiens aux hommes profondément religieux. Je ne peux pas me figurer un dieu qui récompense et punisse les objets de sa création et qui enfin possède une volonté de même espèce que celle que nous expérimentons en nous-mêmes. Je ne veux pas et ne peux pas non plus concevoir un individu qui survive à sa mort corporelle.(...)

Tout ce qui est fait et imaginé par les hommes sert à la satisfaction des besoins qu’ils éprouvent, ainsi qu’à l’apaisement de leurs douleurs. Il faut toujours avoir cela présent à l’esprit, si l’on veut comprendre les mouvements intellectuels et leur développement. Car les sentiments et les aspirations sont les moteurs de tout effort humain et de toute création, (...). Nous voyons qu’au berceau de la spéculation et de la vie religieuse se trouvent les sentiments les plus divers. Chez le primitif, c’est en premier lieu la crainte qui fait naître les idées religieuses, crainte de la faim, des bêtes sauvages, de la maladie, de la mort.(...). Comme à cette étape de l’existence, la compréhension des connexions causales est d’ordinaire bornée, l’esprit humain invente des êtres plus ou moins analogues à nous, et fait dépendre les événements redoutés de leur volonté et de leur action. On pense à disposer favorablement des êtres en exécutant des actes et en faisant des sacrifices qui, d’après la croyance transmise d’âge en âge, doivent les apaiser ou les rendre favorables à l’homme. Dans ce sens, je parle de religion-crainte. Celle-ci n’est pas créée mais cependant essentiellement stabilisée par la formation d’une caste sacerdotale spéciale, qui se donne comme l’intermédiaire entre les êtres redoutés et les peuples et fonde là-dessus sa position de « puissance dirigeante ».(...).

Une seconde source de formation religieuse réside dans les sentiments sociaux. Les pères et mères, les chefs des grandes communautés humaines sont mortels et faillibles. L’aspiration à la direction, à l’amour et au soutien donnent l’impulsion à la formation de la notion sociale ou morale de Dieu Providence, qui protège décide, récompense et punit. C’est le Dieu qui, selon l’horizon de l’homme, aime et favorise la vie de la tribu, de l’humanité, voire la vie en général,. Il est le consolateur dans le malheur et l’aspiration inapaisée, et il protège les âmes des trépassés. Telle est la notion sociale ou morale de Dieu.(...).    

A tous ces types est commun le caractère anthropomorphique de l’idée de Dieu. Ce ne sont que des individus particulièrement doués et des communautés particulièrement nobles qui s’élèvent au-dessus de cet échelon de la vie religieuse. Mais chez tous, il y a encore un troisième degré de la vie religieuse, bien qu’il soit rare dans sa pure expression. Je veux l’appeler religiosité cosmique. Il est difficile de la rendre intelligible à qui n’en sait rien, d’autant plus qu’aucune idée d’un Dieu analogue à l’humanité n’y correspond. L’individu ressent l’inanité des désirs et des objectifs humains et la sublimité de l’ordre admirable qui se manifeste dans la nature ainsi que dans le monde de la pensée. L’existence lui donne l’impression d’une espèce de prison et il veut éprouver la totalité de l’existence cosmique comme une unité pleine de sens. (...) Les génies religieux de tous les temps se sont distingués par cette religiosité cosmique qui ne connaît ni dogmes, ni Dieu conçu à l’image de l’homme. Il ne peut donc y avoir aucune Église dont l’enseignement principal serait basé sur la religiosité cosmique. Il arrive ainsi que nous trouvions justement parmi les hérétiques de tous les temps des hommes qui étaient remplis de cette religiosité suprême et furent souvent considérés par leurs contemporains comme des athées, et parfois aussi comme des saints. (...).

Comment la religiosité cosmique peut-elle se communiquer d’homme à homme, puisqu’elle ne peut conduire à aucune notion déterminée de Dieu ni à aucune théologie ? Il me semble que c’est la fonction la plus importante de l’art et de la science d’éveiller et de maintenir vivace ce sentiment parmi ceux qui en sont susceptibles. Nous arrivons ainsi à une conception de la relation entre la science et la religion qui est bien différente de la conception habituelle. D’après la considération historique, on est enclin à tenir la religion et la science pour des antagonistes irréconciliables, ceci pour une raison facile à comprendre. Celui qui est pénétré de la vérité que la loi causale régit tous les événements ne peut pas du tout admettre l’idée d’un être intervenant dans la marche du processus cosmique. (...). La religion-crainte ne trouve pas de place chez lui et pas davantage la religion sociale ou morale. (...). On a, à cause de cela, reproché à la science de saper la morale, mais certainement à tort. Le comportement moral de l’homme doit être basé sur la compassion, l’éducation et les liens sociaux, et n’a nullement besoin d’un fondement religieux. La condition des hommes serait triste s’ils devaient être retenus par la crainte du châtiment et l’espoir d’une récompense après la mort. Il est, par conséquent, facile à comprendre que les Églises aient, de tout temps, combattu la science et persécuté ses adeptes. (...).  

Un contemporain a dit, non sans raison, qu’à notre époque généralement vouée au matérialisme, les savants sérieux sont les seuls hommes qui soient profondément religieux.(...). Vous trouverez difficilement un esprit scientifique, fouillant profondément la science, qui ne possède pas une religiosité caractéristique. Mais cette religiosité se distingue de celle de l’homme simple. Pour ce dernier, Dieu est un être dont on espère la sollicitude et dont on craint le châtiment, un sentiment sublimé de même nature que le rapport de l’enfant à son père, un être avec lequel on entretient des rapports personnels, aussi respectueux qu’ils soient. Mais le savant est pénétré du sentiment de la causalité de tout ce qui arrive. L’avenir n’est pas pour lui moins nécessaire ni déterminé que le passé. La morale n’est pas pour lui une affaire divine, mais une affaire purement humaine. Sa religiosité réside dans l’étonnement extatique en face de l’harmonie des lois de la nature, dans lesquelles se révèle une raison si supérieure que toutes les pensées ingénieuses des hommes et leur agencement ne sont, en comparaison, qu’un reflet tout à fait futile. 

Vous ne rêvez pas. Ces pages ont bien été écrites par le grand physicien. Elles sont extraites d’un essai publié en 1934, « Comment je vois le Monde ».

L'ILLUMINATION DE KRISNAMURTI

Nous avons ici un autre regard. Krisnamurti naît aux Indes en 1896. Il y est remarqué par Annie Besant, présidente de la Société Théosophique. Elle le présente en 1908, sous le nom d’Alcyone, comme une réincarnation actuelle du Christ ce qui scandalise beaucoup de monde et provoque le départ de Rudolf Steiner). Alcyone-Krisnamurti n’accepte pas longtemps ce rôle pesant. S’éloignant progressivement des Théosophes, il revient aux Indes et y enseigne une philosophie de haute teneur spirituelle, libre de toute spéculation surnaturelle ou métaphysique. L’homme authentique doit dépasser ce que les livres, les Maîtres, et la tradition lui ont apporté. Il doit construire lui-même sa propre vérité et résoudre ses contradictions par la sagesse, l’amour, la bonne conduite, le détachement, le réalisme, la libération à l’égard du Moi. Voici quelques extraits librement adaptés des causeries de J. Krisnamurti.        

L’amour n’a pas de problèmes. C’est pourquoi il est si destructeur et si dangereux. La vie de l’homme est faite de problèmes, ces choses continues, sans solution. Sans eux, nous ne saurions que faire. Ils se multiplient donc sans fin. La solution de l’un donne naissance à un autre. La mort, bien sur, est la destruction, elle n’est pas l’amour. Ce n’est pas cette destruction là qu’apporte l’amour ni cette mort là. L’amour, la mort, la création, sont inséparables. On ne peut pas choisir l’un et refuser les autres. Cela ne s’achète pas dans les marchés ou les églises. Ce sont là les derniers endroits ou vous les trouverez. Mais si vous ne les cherchez pas, si vous n’avez pas de problème, plus un seul, alors, peut-être cela viendra-t-il, quand vous regarderez ailleurs. C’est l’inconnu. Tout ce que vous savez doit se consumer sans laisser de cendres. Le passé, riche ou sordide, doit être abandonné sans pensée, sans motif, comme cette fillette qui lance son bâton par-dessus la berge, dans le fleuve. Brûler le connu est l’action de l’inconnu. (Delhi, Inde - 9/1/1962).

Pour apprendre à me connaître, il faut que je sois libéré de toute ma science passée. Autrement dit, apprendre à me connaître est une chose entièrement neuve d’instant en instant. (...). Je veux apprendre à me connaître, et ce moi, (la nouvelle conscience), est une chose vivante et non morte. (...). J’ai peur de perdre l’image que je me suis construite de moi-même (l’ancien ego), image qui est alourdie de science, image qui est une entité morte. Je sens que j’ai peur. Pourquoi ? Parce que je vois que je suis mort ! Je vis dans le passé et j’ignore ce que cela veut dire d’observer et de vivre dans le présent. (...). Je vois et j’ai peur. (L’impossible question - Dialogue 1 - 2/8/1970).

La sécurité est une chose qui n’existe pas. Ce besoin fébrile de sécurité fait partie de l’observateur, du centre, du singe. Et ce singe dans son agitation, la pensée, a morcelé le monde, en a fait un affreux chaos, a créé d’épouvantables tourments et des douleurs indescriptibles. Et la pensée, si intelligente, si érudite, si efficace qu’elle soit, est incapable de résoudre ces problèmes, de mettre de l’ordre dans ce chaos. Il faut qu’il y ait un moyen de s’en sortir, mais ce n’est pas par la pensée. (Krisnamurti - L’impossible question - Dialogue 7).

La pensée est mécanique. C’est un processus matériel. La pensée est mesurable. L’intelligence ne l’est pas. Si la pensée n’a aucun rapport avec l’intelligence, la cessation de la pensée est-elle l’éveil de l’intelligence ? La pensée a inventé le temps. Elle se meut dans le temps. Elle se modifie avec lui et change de façon arbitraire. Elle est toujours un mouvement dans le temps. L’intelligence ne peut dépendre de conditions pour être vraie. Elle dépend du cerveau pour exister mais celui-ci ne la crée pas. Il faut que le cerveau soit silencieux pour qu’elle agisse. L’absence de silence signifie l’échec de l’intelligence. La pensée est mouvement continuel donc dysharmonie. La pensée est un indicateur qui pointe vers l’intelligence, mais aussi vers la matière. En fait, en ce monde matériel, la pensée, le mental, l’intellect dominent le monde et laissent très peu de place à l’intelligence. Lorsqu’une partie domine, l’autre ne peut que s’effacer. La pensée recherche sans cesse la sécurité et ne peut s’en passer. L’intelligence tend vers l’harmonisation progressive. Elle est elle-même sécurité et ne la recherche pas. Dans notre monde, le cerveau est devenu chaotique et bruyant. L’intelligence ne peut se manifester dans un cerveau bruyant. La pensée doit être silencieuse pour que s’éveille l’intelligence. Tout mouvement de la pensée rend cet éveil impossible.

La matière, la pensée, l’intelligence remontent tous à la même source unique d’énergie, mais comme trois fleuves de sens différents. La pensée est multiple, divisée et fragmentée. L’intelligence est une énergie non divisée. La source est là, non contaminée, sans mouvement, sans contact avec la pensée. L’intelligence peut comprendre comment fonctionne la pensée qui s’est construite en tant qu’instrument nécessaire de survie. Elle est incapable de contempler sa propre mort, c’est pourquoi l’unité a été rejetée. Celui qui  s’imagine mort, se projette toujours vivant en se regardant mort. La pensée a commencé par désirer la continuité de l’organisme puis elle a désiré sa propre continuité. Elle a alors créé les images d’une illusion d’immortalité, un état au-delà de la mort, une projection de son désir de perdurer. Avec le temps, et s’appuyant sur la peur de la mort et la soif d’harmonie de l’intelligence, la force de la pensée a créé une image artificielle de Dieu, de Jésus, de Krishna, ou autre chose. En ayant foi en cette image dominante, on espère établir une sorte d’harmonie. La pensée est le plus souvent inconsciente, et l’inconscient refuse les tentatives de contrôle par le conscient. Beaucoup plus rapide que lui, il ne peut être atteint que par une action qui ne fait pas directement appel au conscient. La pensée doit être rétablie comme instrument au service de l’intelligence. N’écoutez pas l’autre avec des oreilles conscientes mais avec des oreilles plus profondes. Il n’y a que l’affection et l’amour. C’est cela qui agit, et rien d’autre. ( Dialogue avec David Bohm - 7-10-72).

Comme on le voit, Krisnamurti rejette toutes les religions qu’il considère comme des erreurs. Il n’a pas de théorie, ne veut pas de disciples, et ne donne pas de conseils. Il se borne à poser des principes qui doivent permettre à chacun de se construire et d’aller le chemin de sa libération. Dans le dernier dialogue, l’interlocuteur de Krisnamurti est David Bohm, professeur de physique théorique au Birkbeck College de l’Université de Londres. C’est un grand savant auteur de plusieurs ouvrages fondamentaux sur le rôle du hasard et la relation de causalité dans la physique, la théorie quantique et la théorie de la relativité. Rappelons aussi que Krisnamurti pensait que le moi ne peut dissoudre le moi, mais qu’au cœur du moi peut s’installer une compréhension émanant d’un niveau de conscience plus profond. Il est beaucoup plus important, disait-il, de découvrir quelle est la signification de l’activité mentale et comment elle fonctionne que de nous évertuer à discipliner notre pensée par un effort émanant de cette pensée même. Krisnamurti est mort en 1986.

L'ILLUMINATION DE VAN RIJCKENBORGH
(La Rose-Croix de Harlem)

La Rose-Croix de Harlem est une société initiatique qui se présente comme une école gnostique destinée aux chercheurs. Elle a été fondée en 1924, à Haarlem, par Jan van Rijckenborgh, (Jean Leene) et Catharose de Petri, (H. Stock-Huysen). Elle transmet les enseignements spirituels hérités du 17ème siècle et reprend les travaux de Steiner et de Max Heindel. Persécuté pendant la guerre, le mouvement s’est ensuite implanté dans de nombreux pays en Europe, aux États-Unis, au Canada, en Amérique du Sud, en Afrique et en Australie. Il est reconnu comme religion dans certains d’entre eux. L’enseignement de la Rose-Croix de Harlem est présenté en France par le Lectorium Rosicrucianum, (ou Rose-Croix d’Or), dont le siège est au Centre International du Phénix, Château de la Haye, à Guerville en Seine Maritime. Il est également porté par de nombreux centres locaux dans les principales villes du pays.

L’enseignement de Jan van Rijckenborgh se veut résolument gnostique tout en s’inscrivant fermement dans la tradition du Christianisme originel. Il se réfère à la Gnose égyptienne, à l’Hermétisme, au Catharisme dont il a conservé les sacrements, et au Rosicrucianisme allemand du 17ème siècle. On y trouve des synthèses de traditions, Cathares et Templiers, Monachisme catholique, Hermétisme égyptien, Alchimie, Kabbale, Manichéisme, légendes autochtones ou arabes.

C’est une vision panthéiste de la Création. Il y a une seule réalité, le Royaume, le champ total de la Manifestation Divine, décrit comme un ensemble de sept domaines de vie qui s’interpénètrent. Chaque forme existe à la fois dans chacun des sept plans, et c’est sa globalité qui donne son sens à l’être considéré. Comme tous les êtres issus de la Manifestation Divine, l’Homme Originel est à la fois unitaire et septuple. Il est l’image du macrocosme, l’univers cosmique, et, dans ce « Microcosme », on retrouve les sept aspects de manifestation. L’Homme possède un corps physique, un corps vital, un corps astral (de désir), et un intellect, reliés par trois liaisons. A l’origine, tous ces aspects étaient conformes aux lois du plan divin. Mais, attiré par la brillance de son propre reflet dans le Monde temporel, l’Homme s’est éloigné du plan originel. Depuis cette descente dans la matière, son âme, intermédiaire entre le Corps et l’Esprit, est endormie, et l’Homme ne peut se libérer ni ici-bas ni dans l’au-delà.

Notre monde temporel fait aussi partie du Royaume. Cet aspect de la Pensée divine permet la manifestation de son infinitude. Ce monde est dialectique, au sens hégélien du terme. Son existence implique l’opposition entre les forces de construction et de destruction avec des réactions constantes d’équilibrage. Dans ce monde trompeur rien de permanent ne peut être établi. La vie monte, brille, puis descend, aboutissant toujours à la souffrance et à la mort. L’Homme Originel, l’Adam, créé éternel dans un autre plan du Royaume, ne peut pas disparaître. Il en subsiste toujours une faible étincelle. Van Rijckenborgh l’appelle la Rose et la situe dans le cœur de l’homme naturel.

Après la chute de l’Homme dans le temps, et parce que Dieu n’abandonne pas la complétude de sa création, l’Esprit conçut un plan de secours et développa l’homme terrestre afin de prendre temporairement, dans le Microcosme, la place de l’Être endormi. Celui-ci peut être réveillé dans ce monde à partir de la Rose du Cœur. Comme le dit Hermès, l’Homme immortel originel est maintenant uni à une personnalité mortelle. Cet être limité ne peut s’exprimer que dans les deux aspects, visible et invisible, du plan temporel du Royaume. Mais l’homme naturel peut cependant choisir d’ouvrir, ici-bas, dans cette vie, la voie de retour dans le domaine originel du Royaume. 

Outre ce monde d’illusion, il existe donc un autre monde, celui des autres plans de la création divine. Conformément à la pensée gnostique, il y a bien deux ordres distincts de nature qui existent simultanément dans le même espace de la Plénitude divine. Le premier champ de vie est intemporel et imperceptible à nos sens ordinaires. Le second est matériel et temporel. Van Rijckenborgh enseigne qu’il a un aspect visible, notre milieu de vie ordinaire, et un aspect invisible, astral, subtil, une sorte d’enveloppe qui reflète tous les phénomènes visibles. Cet au-delà, où vont les morts, est aussi un espace temporel. L’erreur commune est de considérer la conscience biologique humaine comme le seul Esprit. L’homme temporel a utilisé ses pouvoirs pour satisfaire ses désirs, et il a créé dans le champ de la Terre un grand afflux de formes-pensées. On y trouve toutes les pulsions humaines et toutes les tensions induites par les luttes engagées pour satisfaire ou refouler les passions. Ces forces subtiles peuplent l’astral de la Terre de faux dieux et déesses, de noirs démons et d’anges lumineux.

Jan van Rijckenborgh nous dit qu’à la mort, la personnalité pénètre dans la partie invisible du Monde, où ses divers corps se dissolvent. Dans les croyances traditionnelles, ces aspects invisibles sont pris pour le Monde Originel, mais aucune entreprise temporelle ne peut échapper aux lois qui régissent le domaine dense du Royaume. La Terre a un aspect physique et elle a également un aspect astral ou de désir. Cet Au-delà où vont les morts appartient aussi au domaine temporel. Il n’est pas un lieu de séjour éternel, et la mort du corps physique n’est absolument pas le point d’entrée dans l’immortalité. Après la mort, le Microcosme éternel prend conscience de son état et la mémoire de la vie achevée s’ajoute à celles des vies précédentes. Le Microcosme subit donc l’influence des tensions et désirs accumulés dans sa conscience propre, l’Être aural. C’est pourquoi, la vie dans l’au-delà est généralement suivie d’une nouvelle incarnation dans un autre corps biologique.

Il ne s’agit pas du retour sur Terre de la même conscience-moi dotée d’un nouveau corps physique, mais de la remise en œuvre du moyen de secours conçu pour ressusciter l’Homme originel. De la personnalité mortelle disparue ne demeure que l’essence de la vie passée enregistrée dans le Microcosme immortel. L’Être aural contient la somme des expériences faites au cours des incarnations successives par les diverses personnalités temporelles qui se sont succédées dans le Microcosme éternel, et la nouvelle incarnation est nécessaire pour qu’une autre personnalité mortelle, prenant conscience de la situation, offre une nouvelle chance de réveil à l’Âme divine. La libération de l’Être aural implique en effet que le Microcosme puisse se relier à l’Esprit. Et, en approchant de la Lumière, l’homme découvre qu’elle ne l’accepte pas dans son état naturel.

Je ne peux pas continuer à décrire l’illumination de Van Rijckenborgh en restant sur le seul plan intellectuel ou doctrinal car ce serait en trahir gravement l’esprit. Au-delà de la nécessité d’une compréhension préalable des données reliées à l’Hermétisme, l'enseignement s’adresse essentiellement au cœur des élèves qui sont appelés à répondre de façon sensible aux appels intérieurs de l’Homme originel prisonnier du Monde et du Temps. L’enseignement de Van Rijckenborgh se veut résolument christique. Dans notre temps et notre civilisation, Jésus-Christ est l’image de la nouvelle impulsion des forces éternelles proposant le salut pendant l’existence terrestre. Quand l’homme veut répondre à l’appel divin, il doit se relier à un  principe médiateur de la Nature Originelle. De l’état préparatoire, l’état Jean-Baptiste, il passe à l’état d’Âme vivante, l’état Jésus, puis atteint enfin l’état de résurrection, l’état Christ. C’est là le sens secret des mythes issus du Christianisme originel,  contemporain à l’Hermétisme.

Il ne s’agit pas d’améliorer la personnalité jusqu’à un point sublime. Il faut devenir une créature nouvelle par la résurrection de la Personnalité Céleste, la construction d’un nouveau corps, une Transfiguration à l’image de celle du Christ, qui devra être accomplie dans ce corps de chair. Ce cheminement difficile est décrit symboliquement dans Les Noces Alchimiques de Christian Rozencreutz de Valentin Andréae. Par le travail de la Gnose, la personnalité de chair et de sang  peut être rendue apte à permettre le retour du Microcosme à sa vraie place dans le Royaume. Mais la personnalité charnelle mortelle ne peut être conservée. Une personnalité nouvelle, immortelle, doit être reconstruite, qui seule pourra permettre à l’âme divine de renaître. Ce Temple dans l’Homme est à construire ici-bas, pendant cette vie même et dans la personnalité mortelle.

Les hommes déchus, dit Van Rickenborgh, sont poussés par le désir de rejoindre Dieu en s’y reliant par des religions. Celles-ci sont établies sous deux aspects. L’aspect exotérique est un culte accompli dans un temple extérieur, avec l’aide de prêtres-médiateurs. Il est destiné aux hommes qui ne ressentent pas encore le souvenir du Royaume originel. L’autre aspect, ésotérique, est enseigné par des initiés à ceux que la ressouvenance de leur splendeur passée pousse à l’action libératrice. Au fil du temps, les cultes exotériques se sont perdus dans des constructions dogmatiques. Aujourd’hui, les écoles ésotériques des mystères restent les seules gardiennes du vrai chemin libérateur. Les hommes répondent selon leur nature. Les uns restent dans leur prison en s’efforçant d’en modifier l’aspect par la révolte ou l’action scientifique, politique, ou sociale, ou par  l’engagement religieux. Les autres entreprennent la reconstruction auto-libératrice du Temple Intérieur par la Transfiguration.

Van Rickenborgh, mort en 1968, ne rejette cependant pas les réalités de l’existence terrestre. « La Fama du vivant Christianisme gnostique, dit-il, ne peut se tenir à l’écart ni de la science, ni de la religion, ni de la politique, car c’est toujours l’intention du Logos que les trois manifestations de l’humanité véritable, art, science, et religion, s’unissent et finissent dans l’acte, dans la communauté de la vraie vie, afin qu’il en résulte un champ formateur de forces libératrices et réalisatrices ». (Appel de la Fraternité de la Rose-Croix - Jan van Rickenborgh - Voyage en Espagne).

L'ILLUMINATION DU MOUVEMENT DU NOUVEL ÂGE
(
New Age )

Vous voyez que nous sommes, en cet instant, plongés dans une réflexion fondamentale. Vous avez constaté les grandes différences entre les démarches précédentes. Elles démontrent que la religiosité, l’inspiration artistique, et la recherche scientifique sont des réponses toutes personnelles à la perception d’un manque. Elles expriment la nécessité que ressentent les hommes d’assouvir une faim non satisfaite. Exprimées dans des formes différentes, ces  élans, des espoirs, ou ces ressouvenances, d’un état de meilleure satisfaction semble être une caractéristique constante attachée à la nature humaine. Cherchant à établir ou rétablir son bonheur, l’Homme Individu base la conduite de sa vie sur le type de recherche, d’expression sensible, de religiosité, ou de foi, qui correspond à sa propre nature et il exprime cela à travers sa propre culture.

Victor Hugo, quoique violemment antipapiste, demeurait de toute évidence dans le cadre des traditions bibliques. On peut difficilement comparer ses idées avec les écrits rénovateurs des Théosophes qui ont suivi Helena Petrona Blavatsky, Annie Besant, Alice Bailey, Rudolf Steiner, Max Heindel, Jiddu Krisnamurti, ou  des chercheurs comme C.G. Jung tant d'autres, au début du vingtième siècle. Leurs œuvres et leurs influences furent considérables. Voici un extrait d'une lettre adressé par le théosophe J.J.Van Der Leeuw à C.W.Leadbeater l'un des fondateurs de la Société Théosophique.

 L'homme est essentiellement divin. Comme fils de Dieu il participe de la nature de son Père et partage Sa Divinité. La propre, la véritable demeure de l'homme est donc le monde du Divin; là nous avons la vie, le mouvement et l'être "d'éternité en éternité". Dans son propre monde, l' Ego de l'homme se livre à ses activités particulières; il y mène une vie de joie et de splendeur qui dépasse toute conception humaine. Pourtant, il y a une leçon ou expérience qu'il ne peut apprendre dans son propre monde; elle l'oblige à déployer sa conscience dans les mondes de la manifestation extérieure où règne avec la multiplicité l'antithèse du "Moi" et du "Non-moi". Là seulement, au moyen de corps composés de la matière de ces mondes extérieurs, l'Ego peut acquérir la soi-conscience, c'est-à-dire la conscience de soi-même en tant qu'individu séparé. Le monde divin, véritable demeure de l'Ego est un monde où cette distinction entre le moi et le non-moi n'existe pas, mais où chaque partie jouit de la connaissance universelle appartenant à l'ensemble. Voilà pourquoi la notion particulière du soi, nécessaire à l'Ego, ne peut s'y acquérir. Ce n'est que dans le triple univers de la manifestation extérieure, le monde physique, le monde émotionnel et le monde mental, que la dualité du sujet et de l'objet se montre nécessaire à l'acquisition de la soi-conscience. C'est donc bien pour s'instruire que l'Ego se répand dans ces mondes extérieurs et qu'il emprunte leur matière pour s'en faire des corps. C'est exode de l'âme vers les mondes obscurs, symboliquement décrit dans l'histoire de la Genèse. Le paradis initial n'est pas un état durable, malgré toutes ses beautés et toutes ses harmonies. L'âme doit goûter au fruit de l'arbre du bien et du mal, à celui de la connaissance, fût-ce au prix du paradis. Ayant constaté en soi-même le désir de connaître les mondes matériels, l'âme revêt des "robes de peau", des corps physiques, obligée dès lors à subir les conditions de l'existence matérielle, "elle enfante en travail ses enfants". Cet exil prolongé se termine par la rédemption ou régénération; elle s'accomplit quand l'âme retrouve la notion de sa propre divinité, quand le Christ naît dans le coeur de l'homme. Alors le paradis est retrouvé, mais, cette fois, en pleine conscience; l'Ego dans son propre monde divin possède les fruits obtenus par la descente de l'âme dans les mondes matériels.

Ce contenu est typique des engagements gnostiques de la plupart des chercheurs modernes. Après tous les enseignements tirés du passé, nous constatons que ces diverses démarches constituent aussi des illuminations, des flambées fortuites de connaissance. Elles témoignent de la relation à un domaine caché accessible aux seuls chercheurs conscients. Issu d'une même source antique, ces divers éclaircissements de conscience semblent parfois pouvoir prendre des chemins variés.

Depuis les années 70 et 80, dans la foulée de tous ces travaux, un mouvement nouveau apparaît dans les communautés métaphysiques ou occultes. Au départ, il n'est pas structuré, mais, composé de nombreux courants relativement distincts, il expose une vision particulière du Monde, avec en arrière plan l'idée de l'émergence imminente d'un nouvel état de conscience permettant l'accès à davantage de spiritualité et à une meilleure connaissance de la véritable réalité de l'être. C'est le "Nouvel Âge". Par certains aspects, en particulier par ceux qui s'opposent à la doctrine catholique, ce mouvement ésotérique est considéré comme une résurgence de la Gnose du deuxième siècle. Souvenons-nous que l’ancien Gnosticisme a donné naissance à divers mouvements ésotériques dont la philosophie rosicrucienne du 17ème siècle et la Franc-maçonnerie, puis, dans le 19 et 20ème siècles, la Théosophie et certains cercles de magie.

Rappelons qu'à l'origine, la Gnose n'est qu'une simple façon de penser le Monde et s'accorde donc alors parfaitement avec toutes les religions. C'est la persécution dont ils sont l'objet qui amène les Gnostiques à se regrouper et à formaliser leurs convictions. En effet, la définition de la doctrine chrétienne fut essentiellement une réaction contre le Gnosticisme. Elle s'est traduite par une répression sans merci qui a abouti à la mise en sommeil de ces courants de pensée, aujourd'hui résurgents. Les Gnostiques sont donc les premiers théologiens des débuts de la Chrétienté. Ils enseignent encore aujourd'hui que le moi spirituel (inconscient) de l’homme est une partie altérée de Dieu emprisonnée dans un monde étranger. Mais l’homme, dans son état actuel, peut devenir conscient de ses origines et de son essence divine grâce à des révélations venant de l’au-delà. Cette révélation gnostique ne peut être obtenue par la raison mais elle peut l'être par la révélation chrétienne, l'appel intérieur de l'esprit christique.

Pour les Gnostiques, Dieu est au-delà de tout concept raisonnable et de toute dénomination théorique. Il est l’absolu en tout et la source des bons esprits qui forment ensemble le Plérome ou le domaine de la Lumière. Je m’adresserai donc à votre sensibilité irrationnelle par la poésie pour tenter de vous faire approcher, par l’intérieur, un premier aspect de cette révélation, l'idée de l'éveil, de la prise de conscience de l'homme esprit divin, Adam Kadmon, tombé, (par amour selon Hermès), dans la matière et emprisonné depuis dans nos corps biologiques.

Dans la splendeur du Monde, il a vu son image,
En bas, et l’a trouvée si belle,
Qu’il s’est, un temps, ravi en elle.
Hélas, anéanti, dans son grand lit d’étoiles,
Il dort, et nous souffrons nos peines,
Et nous mourons chargés de chaînes.

De sa gloire oubliée, demeure une étincelle,
Un indestructible principe,
Au donjon de l’âme immortelle.
Dans la tour, il perçoit le chant de la Lumière.
Il comprend que l’heure est venue
De lever enfin la paupière.

Il se souvient des Cieux. Il parle du Royaume,
Il dit qu’il demeure en chaque homme.
Il supplie d’une faible voix.
Il pleure, il rit, il dit qu’en nous, il est en croix.
Il souffre et parle de partage,
Accepté par un libre choix.

Il a besoin d’un corps, il a besoin d’une âme.
Il voudrait détruire sa prison
Et revenir à sa mission.
Il est l’idée, la vie, il est l’amour, la joie.
Il est la liberté suprême,
L’océan de douceur extrême.

Il est l’immensité. Il est l’éternité.
Il est le sablier du temps,
Et la conscience du présent.
Il est, dans l’infini, le maître du destin,
L’innocence sans le chagrin,
La pureté du premier jour.

Il est la force énorme et l’horizon sans fin.
Il est la clarté du matin.
Tout l’avenir est dans sa main.
Il est la vérité, il est la majesté.
Il aspire à ce qu’il était,
Qu’il veut être, et sera demain,

Adam Premier, l’Éon divin, le Roi du Monde.

C'est le Théosophe David Spangler qui formalisa en 1970 les idées fondamentales du mouvement New Age, à partir de la Fondation Findhorn. Il croyait à la libération de nouvelles vagues de vibrations spirituelles. De retour au États-Unis, en 1976, il publia un livre, "La naissance du New Age", qui attira de nombreux leaders d’organisations occultes dont Richard Alpert et Timothy Leary. Des périodiques furent publiés pour disséminer l’information et organiser ce mouvement diffus. Mais des pratiques plus ou moins occultes, (tarot, astrologie, I-King, yoga, Zen, médecines alternatives, régimes naturels ou végétariens, chiropratique, acupuncture, par exemple), ont été peu à peu intégrées par le mouvement. Ce fût dommageable car elles brouillèrent la clarté initiale du message. En relation avec ces aspects seconds, vers la fin des années 80, quoique structuré, le mouvement New Age perd de sa force. En tant que mouvement religieux, il est alors parfois tourné en dérision en raison de son acceptation excessive des idées et pratiques non scientifiques et, fin 1995, les New Agers américains parlent de passer à l'étape suivante.

JÉSUS, DIONYSOS, OSIRIS ou KRISNA.

D'une façon générale et sur le plan du mode de pensée, le New Age est considéré comme holistique, panthéiste et même panenthéiste. Cela veut dire qu'il conçoit l'Homme, le Monde et Dieu de façon globalisante et unitaire, tout étant Dieu, et même tout étant en Dieu. Au delà de tous les aspects illusoires du monde sensible, il n'y a qu'une seule réalité ultime et spirituelle, à l'image du ""brâhman" de l'hindouisme. Il faut comprendre que cette pensée est en opposition totale avec la pensée religieuse judéo-chrétienne fondamentale qui postule l'absolue séparation entre le Dieu créateur transcendant et toutes ses créatures, qu'elles soient spirituelles ou matérielles. Il est évident que ces deux visions sont et demeureront inconciliables. Le Nouvel Âge annonce aussi que l'élévation du niveau de la conscience humaine s'accompagnera de la paix internationale, de la fin du racisme, de la pauvreté, de la maladie, de la faim et de la guerre. C'est la transformation spirituelle propre à chacun des individus qui permettra celle de l'humanité. C'est en changeant soi-même que l'on peut changer le monde car on ne peut changer le tout sans en changer chacune des parties.

Les New Agers estiment que toutes les religions se valent et ne portent sur elles aucun de jugements de valeur. Dans cette optique, et restant résolument à l’écart de toute vaine polémique doctrinale concernant l’historicité des mythes du Christianisme, je m’adresserai à nouveau à votre sensibilité en tentant de montrer comment certains courants de cette libre pensée holistique interprètent les traditions en les reliant aux diverses religions antiques ou modernes.

 

Jésus, Dionysos,
Divins sauveurs des hommes. Osiris ou Krisna,
Tous ces dieux venus du Cosmos,
Pour dire à tous les hommes, l’universelle saga,
Et révéler l’appel en nous, l’histoire d’Adam,
Que d’autres, en d’autres temps, racontent autrement.

Jean est, chez nous, celui
Qui reconnaît ce cri dans le désert de l’âme,
Entend les pleurs de l’autre en lui,
Et permet que s’allume, dans son cœur, une flamme.
Puis le Baptiste va. A l’autre il laisse place,
Après avoir frayé le chemin de la grâce.

L’âme vierge secrète,
Nous l’appelons Marie. Son cœur, humain berceau,
Accueille ici le nouvel Être,
Enfantant, dans la chair, pour l’Autre, un corps nouveau
Qu’elle chérit, nourrit, et fait grandir en elle,
Et donne, librement, pour une vie nouvelle.

Le tout-petit enfant,
A Noël, est l’image de la vraie renaissance,
Le moment du réveil d’Adam,
Si longtemps attendu, l’espoir de délivrance
De l’animalité, et du sang, et des chaînes,
Dans notre sombre, et sale, et triste étable humaine.

Jésus le pèlerin,
C’est l’étonnant miracle de cette incarnation,
Dans chaque homme, sur le chemin,
Étroit et difficile, vers la transmutation,
Par l’éternel Esprit et dans le libre choix
De la mort de son Moi, par amour, mis en croix.

Et la résurrection,
A l’aube d’or de Pâques, c’est soudain le retour
D’Adam, la transfiguration
Du corps en Christ. Et l’étincelle en ce seul jour
Devient brillant soleil. L’Homme éternel renaît
Dans la restauration du Royaume parfait

Osiris ou Krisna,
Ces êtres merveilleux ne sont que des symboles,
Jésus, Ba’al, Attis, Bouddha,
Dont nous sommes tentés de faire des idoles.
Ces mythes composés pour nous ouvrir les yeux,
D’autres, en d’autres lieux, les transforment en Dieux.

Je me dois dire ici ma stupéfaction lors de ma recherche documentaire concernant le Nouvel Âge. L'agressivité des adversaires du mouvement est indescriptible. Les textes sont généralement très partiaux et venimeux. Les contenus des sites Web qui prétendent discuter les idées du mouvement sont même parfois délirants. On a l'impression de retourner au temps médiévaux des guerres doctrinales et de l'Inquisition, et l'intolérance menace. Mais cela vous pouvez le constater vous-mêmes sur Internet. Voici un court extrait d'une page typique.

 Ce mouvement global ../.. annonce l'accomplissement de la prophétie biblique concernant la venue de l'Antichrist ../.. Dirigé par l'esprit supérieur de Satan, le Nouvel Age est un système de tromperie organisé. Comme toutes les œuvres de Satan, il allie souvent la vérité avec l'erreur. Bien avant l'avènement de ce mouvement satanique, la Bible annonçait un nouvel âge ../.. La tentative hostile de Satan de contrefaire ce véritable «nouvel âge» échouera finalement, et contribuera en fait à la réalisation du plan de Dieu../.. !"

Je donnerai encore une courte citation d'un ouvrage catholique exposant les idées du Nouvel Âge. Elle montre le ton général qu'adopte la discussion.  

"Le Christianisme ne peut concevoir le New âge que comme un concurrent, un rival, et un danger".

Les idéologies théistes établies, et particulièrement toutes les intolérantes religions dites "du Livre", ont jadis conquis le monde par la parole mais aussi, et trop souvent, par la violence, le fer et le feu. Elles ont remodelé ou même effacé les civilisations millénaires et les pensées antiques et elles ont pour un temps établi leurs empires sur le monde. Il est évident que les idées panthéistes et tolérantes du Nouvel Âge peuvent paraître menacer leurs hégémonies. La violence et l'intolérance ne demandent qu'à renaître, si même elles ont jamais cessé.

L'empire, c'est toujours la conquête et la guerre !
La religion, c'est toujours la doctrine et la contrainte !
Que peut-on donc attendre des impérialismes religieux ?

En fait, le New Age constitue globalement le phénomène religieux le plus significatif du 20ème siècle. C'est un mouvement de fond puissant qui, quoique redevenu diffus, reste aujourd'hui présent et fort influent comme le prouvent le nombre des ouvrages exposés dans les rayons des librairies spécialisées et les pratiques répandues de médecines alternatives. On constate également un développement considérable d'écoles de pensée, de littératures, de films de cinéma, de programmes télévisés et de sites Web qui prônent les valeurs, les théories et les pratiques qu'il propose.

Comme la Gnose antique dont il semble incarner un retour, le New Age, est d'abord une libre façon de penser et de regarder globalement et différemment le monde. Face aux critiques, il tente parfois de se définir et de se structurer, mais cette démarche est contre sa nature, laquelle est autonome dans son principe même. Les hommes qui se tiennent dorénavant debout dans l'éclairage de la Gnose n'ont pas besoin de béquilles théoriques ou doctrinales. Le mouvement a donc changé d'aspect mais les idées du New Âge se sont largement répandues dans le Monde et dans l'astral de la Terre. En s'appuyant sur la soif de connaissance et la faim de Dieu qui sommeillent au cœur de chacun, c'est dorénavant dans l'anonymat et le silence qu'elles travaillent à la transformation des hommes.

 La soif de connaissance et la faim de Dieu sont irrationnelles

LE CONTACT AVEC LE SACRÉ

Revenons maintenant à l'objet qui fonde notre étude, et comprenons que plusieurs moteurs très différents ont fourni l’énergie nécessaire pour faire émerger du néant les révélations citées ci-dessus jusqu’au niveau d’une expression consciente exprimable. Comme pour toutes les théories scientifiques, religieuses ou philosophiques, la diversité des contenus et des expressions utilisées démontre également que les instruments mentaux utilisés pour faire passer l’illumination intérieure au niveau conscient ne sont pas très adéquats. Une importante question se pose, qui est de savoir à quel niveau de conscience notre être intime est assoiffé de connaissance ou d’absolu.  Le corps met constamment en œuvre des machineries variées qui remontent au début de l’aventure des vivants. Notre appareillage mental est également composé de divers mécanismes mis en place par l’évolution. De façon simplificatrice, on considère souvent trois niveaux, le cerveau reptilien, (le plus antique, dont le rôle est d’assurer le fonctionnement vital), le cerveau limbique ou mammalien, (siège de l’affectivité et de la connaissance environnementale), le cerveau humain ou néo-cortex, (le plus récent, siège de la conscience raisonnable). Ces trois niveaux ne sont pas encore intégrés, et, dans la vie courante, nous mettons mécaniquement en œuvre les plus anciens, hors du champ de la perception consciente, c’est-à-dire à notre insu, tout comme le faisaient nos lointains ancêtres animaux.

L’homme conscient est la forme actuelle, le dernier avatar de l’espèce, mais les fonctions primitives qu’il intègre n'ont pas disparu dans les abîmes du temps. Elles sont seulement masquées par les couches plus récentes qui fournissent les facultés de cognition et de conscience. Les modes de fonctionnement antécédents sont enfouis dans le corps et dans le mental, d’autant plus profondément qu’ils sont plus antiques. Ils sont d’autant plus éloignés du champ d’investigation de la conscience qu’ils sont plus anciens. Nous savons aujourd’hui que l’essentiel du fonctionnement mental est inconscient. Cela vaut aussi concernant la réponse aux appels d’un manque, tant qu’elle reste bloquée dans une attitude mécanique inconsciente. Quel cerveau, quel outillage mental, l’Homme utilise-t-il actuellement dans cette recherche ?

Je n’engagerai pas ici l’étude du psychisme humain, mais je vous prie cependant de considérer les arguments qui suivent. Si la faim d’absolu, la soif de connaissance, (ou le manque de Dieu), montait du cerveau récent, de la couche intellectuelle consciente et raisonnable, les réponses humaines se présenteraient systématiquement sous une forme rationnelle, cohérente, relativement uniformisée. Ce n’est pas le cas, même si quelques modèles, certaines théories ou doctrines, peuvent paraître temporairement présenter ces qualités. Elles exigent toujours, quelque part, une adhésion irrationnelle à un postulat, un article de foi à partir duquel est construit l’ensemble de l’appareil théorique ou doctrinal.

La religiosité, par exemple, à la réflexion, (ne réagissez pas trop vite), semble être une fonction nettement archaïque qui monterait du siège de l’inconscient, ou du cerveau affectif, (ou cerveau limbique). Ces niveaux profonds ne perçoivent que des affects ou des sensations. Ils ne communiquent pas clairement avec le cerveau intellectuel tardif et ne lui envoient que des flux d’images symboliques qu'il doit interpréter. En sens inverse, ils sont, par nature, inaccessibles aux conclusions des raisonnements que l’intellect peut élaborer et réagissent à d’autres moteurs plus antiques, (plus primitifs). C’est pourquoi, lorsque nous travaillons à construire notre personnalité humaine, y compris dans sa dimension spirituelle, donc en relation avec cette origine lointaine, nous devons le faire consciemment, en y intégrant ce fondement profond, antique et primordial.

Certaines écoles ésotériques expriment cela en disant que l’Esprit est secrètement entré dans l’Homme par le bas, par l’animal, et qu’il atteint seulement maintenant son intellect. C’est cette révélation, (ou cette prise de conscience), de l’involution de l’Esprit, de sa descente initiale dans la matière brute, dans la nature animale inconsciente, puis de son évolution, ou lente remontée dans la conscience humaine, qu’elles appellent Incarnation de l’Esprit.

On peut alors aisément comprendre que tous les efforts conceptuels pour atteindre la connaissance totale, (ou la Divinité), par le haut, par une construction intellectuelle théorique et raisonnable, soient vains et voués à l’échec. En fait, la relation de cette soif d’absolu avec les niveaux inconscients les plus archaïques du mental a des implications métaphysiques extrêmement importantes. Si on l’admet, il faut corrélativement accepter que la construction de l’Homme par l’évolution, y compris l’émergence de sa conscience et de son intelligence, résulte de la réalisation d’un plan antérieur, étranger et extérieur, lequel atteindrait maintenant le point où ce moteur doit être activé. Cela signifierait que l’existence humaine a une cause qui a fixé son but au début des temps et de la vie, bien avant qu’apparaissent la corporéité et le conscient.

La prise de conscience qu’un plan surnaturel peut être en œuvre et nous impliquer en tant qu’opérateur, ou objet activé, prend une signification presque brutale. Ce choc résulte du contact inattendu avec une altérité inconnue, ce qu’il est convenu d’appeler le sacré. La tradition hébraïque, par exemple, a été amenée à traiter cet aspect et le Livre du Zohar décrit les multiples précautions que le Dieu des Hébreux a du prendre en descendant au niveau de la matière pour accomplir sa création. Au-delà des descriptions théoriques, conceptuelles et imagées des littérateurs, demeure un vécu difficile, celui du contact effectif avec le Tout Autre inconnu et surtout la perception expérimentale de la réalité de cette altérité.

 Le contact avec le véritable sacré est redoutable. 

TOUT ENSEIGNEMENT DOIT ÊTRE DÉPASSÉ.

Les propos, cités plus haut, de Jan van Rickenborgh relatifs aux réalités de l’existence terrestre vont introduire un complément à cette prise de conscience. La Fama, (en latin, la proclamation ou la renommée), du vivant Christianisme gnostique, dit-il, ne peut se tenir à l’écart ni de la science, ni de la religion, ni de la politique, car c’est toujours l’intention du Logos que les trois manifestations de l’humanité véritable, art, science et religion, s’unissent et finissent dans l’acte, dans la communauté de la vraie vie, afin qu’il en résulte un champ formateur de forces libératrices et réalisatrices. Ainsi, juge-t-il, réunies sous l’égide du Logos, les trois manifestations humaines, les trois formes d’action qui nous occupent, répondent toutes trois, de façon diversifiée, à une proposition étrangère à l’Homme. C’est dans cet esprit que je vous ai proposé de cheminer un peu plus en ma compagnie. La réunion en une commune approche de disciplines très différentes peut vous apparaître, en ce temps, tout à fait surprenante. Dans l’Antiquité comme au Moyen Âge, elle était tout à fait courante. Les personnages qui ont marqué l’histoire de la pensée étaient à la fois des scientifiques et des philosophes, des métaphysiciens et des médecins, des mathématiciens et des théologiens, des géomètres et des dialecticiens.

La prise de conscience du plan surnaturel nous place évidemment devant le problème de la grâce laquelle est un don venu d’ailleurs. Que l’on applique ce mot à la pulsion spirituelle de la religiosité, ou qu’on l’étende aux autres formes irrésistibles de réponse à des manques remontant au niveau de la formulation consciente, on demeure devant le même problème. Je parle ici tout autant de la soif de connaissance que de la recherche  de l’harmonie ou de la beauté, de la connaissance scientifique, de l’inquiétude métaphysique, de l’inspiration artistique, ou du génie créatif. Ce sont là, finalement des réponses personnelles à une proposition intuitive, par conséquent floue, de participation provenant de l’intelligence universelle. Certains savants comme Einstein ou Jung perçoivent assez bien cette relation qui relie parfois la science et la spiritualité.

Les progrès accomplis dans des domaines aussi variés que la physique, la biologie, l’astronomie, la psychologie, conduisent à repenser certains problèmes posés depuis longtemps par la spiritualité et notamment par la spiritualité orientale. (Mathilde Niels).

Mais tous les hommes ne perçoivent pas cette proposition de la même façon, et certains ne la perçoivent pas du tout. Peut-on alors penser qu’elle ne leur est pas faite ou qu'ils ne sont pas choisis ? On trouve cette notion d’élection, (pensez au Peuple juif élu de Dieu), ou de prédestination, dans un grand nombre de religions. La Gnose antique ressentait aussi cette fracture qu’elle exprimait en partageant l’humanité en deux types d’individus. Les uns, en faible nombre, étaient appelés à la ressouvenance, et les autres, hommes naturels ordinaires, restaient dans l’obscurité de la conscience. Les religions modernes, dont le Christianisme et la Gnose christique, parlent de la Grâce divine offerte aux hommes en général, et acceptée individuellement par ceux qui ont la maturité spirituelle nécessaire.

Identiquement, sur d’autres plans et d’autres institutions, certains individus, semblablement appelés, ou élus, ou dotés, également en faible nombre, perçoivent différemment l’appel du Logos et y répondent par des réalisations artistiques ou scientifiques, tandis que la majorité des hommes, apparemment immatures, restent indifférents à cette recherche. Ce qu’il faut ici bien comprendre, c’est que la qualité d’un homme richement doté résulte du don extérieur lui-même et n’implique donc pas un quelconque mérite personnel. Il n’y a là aucun juste motif d’orgueil ou d’inflation de l’ego mais seulement la source d’un devoir de partage avec les autres hommes.

Ce livre contient d’abondantes données relatives aux sciences, aux religions et aux philosophies mais il n’est ni une encyclopédie ni une méthode ni un enseignement de gourou. C'est seulement un témoignage, le récit du début d’un cheminement privé qui passait par l’acquisition et l’intellectualisation préalables d’un certain nombre de connaissances d’ordres divers. Mais cette nécessité n’était que la mienne. Un tel chemin est toujours personnel et unique. Chacun doit trouver le sien, à l’écart de tout préalable et de toute théorie.

Tout enseignement doit être dépassé.

LA ROSE PAR DESSUS L'ÉPINE

A partir de ce point précis, je vais donc radicalement changer de registre et de discours, et je vais essayer de formuler plus clairement ce témoignage. Je vais donc déposer toutes ces connaissances amassées, utiles et inutiles. Elles constituent cependant la base, le carré de fondation de ma construction personnelle. Sur ceci, en toute liberté et en liaison je l’espère, avec l’intelligence universelle, je vais travailler à concevoir mentalement ce que j’appellerai, me concernant, un temple personnel à la Connaissance et à l’Esprit, qui pour d’autres sera un monument ou quelque autre chose, et je vous invite à en partager la construction.

Un temple ou un monument sont des lieux de rencontre entre un homme et une image qu’il révère, par exemple celle qu’il a conçue de Dieu. C’est pourquoi ses bâtisseurs le veulent toujours grandiose et magnifique. Je voudrais donc fonder celui-ci sur tous ces matériaux si précieux que je viens de déposer, issus des innombrables démarches des hommes visant à rencontrer cet absolu qui leur manque, cet Esprit ou cette Connaissance qu’ils cherchent. Compte tenu de la nature d’absolue tolérance de notre commune réflexion, il ne peut être évidemment question de choisir parmi les innombrables hypothèses relatives à l’origine de l’Univers et du Monde, et de l’Homme, ou de juger des valeurs relatives des diverses convictions ou croyances, (y compris de celles portées par le Christianisme dans notre actuelle civilisation).

Quoi que nous enseigne notre milieu culturel, nous voyons bien qu’Osiris, Ba’al, Dionysos, Krisna, Jésus, et d’autres mythes, racontent à l’évidence la même aventure en l’adaptant à la sensibilité particulière de la civilisation à laquelle ils s’adressent. C’est toujours l’histoire d’un dieu, fils de dieu, trahi et mis à mort par ses proches. Finalement cependant, il ressuscite et rejoint un royaume qui n’est pas de ce monde. Avec le recul nécessaire, nous entendons l’éternelle histoire de la chute d’Adam qui, racheté par la grâce, regagnera un jour le royaume originel. C’est pourquoi nous mettrons sur le même plan toutes ces faibles images décrivant le cheminement vers la réalité absolue. 

Nous sommes déjà des Bouddhas.
Parler d’atteindre quoique ce soit est une profanation,
et, logiquement, une tautologie.

(D.T. Suzuki).

Sur l’argile de la matière et de la corporéité humaine, nous établirons simplement un assemblage de toutes les sciences, convictions, religions, expressions et philosophies humaines. Elles constitueront un immense pavement dont chaque dalle rayonnera la lumière d’une révélation particulière. Chacun se tiendra sur celle qui lui convient, et tous ces pavés lumineux seront également joints par les qualités d’âme des chercheurs authentiques et sincères, celles des fidèles de toutes les églises, les souffrances de leurs martyrs et les extases de leurs saints. Au-dessus, se tendra le sombre ciel originel de tous les mystères, étoilé de toutes les révélations à venir, et alentour s’étendra l’insondable océan de tous les possibles. 

Notre construction sans murs sera ouverte sur l’infini. Nous nous y tiendrons sans aucun rite ni sacrifice, car il y a déjà eu tellement de sang versé, tant d’horreurs commises, tant d’êtres immolés, torturés, mutilés ou humiliés, au nom de toutes les idées saintes, offerts hélas en vain à toutes les idoles des hommes, dans tous les temps du monde.

Alors, amis, réunis en ce lieu intérieur ouvert dans notre mental, nous élèverons nos âmes particulières vers l’image de la Totalité telle que nous l’avons construite, chacun dans sa pensée personnelle. Dans notre temple universel ou face à notre commun monument, nous nous poserons non pas en juges mais en simples témoins de l’inquiétude et de la souffrance humaine.

Revêtus de la dignité de la conscience, nous tenant debouts, non pas dressés à l’assaut des mystères du Ciel mais tournés par l’Esprit vers les réalités temporelles de la Terre, nous ouvrirons nos cœurs à la pluie de savoir, de sagesse et d’amour qui nous est personnellement et mystérieusement consentie par grâce. Chacun dans notre propre personne, nous la recevrons dans notre être total, corps de chair, âme de feu, esprit de lumière, et, tous ensemble, mains ouvertes comme les derviches tourneurs d’Orient, nous répandrons ces dons à la ronde sur tous nos frères les hommes, partout dans le Monde.

Éclairés par l’Esprit, nous voudrions nous tenir sur le pavé du temple comme des piliers lumineux reliant la terre au ciel. Hélas, notre noir héritage karmique nous barre le chemin, et nous restons simplement des animaux étonnants, des petits singes christophores réunissant, encloués l’un à l’autre, Lucifer et Satan. Petits simiens clairvoyants mais encore chargés d’ancestrales caractéristiques animales, nous portons intimement la conscience d’un important travail à faire pendant cette si courte vie terrestre.

 Nous avons à rallumer dans notre âme le soleil spirituel originel.

En vérité, pour pouvoir nous poser en hommes libres, nous devons comprendre ce qu’est notre vieil être intime et briser sa cristallisation. Nous devons transformer à la fois notre humaine et simiesque nature et l’image intérieure que nous avons fabriquée de nous-mêmes. Dans cette attitude, nous retrouvons l’image traditionnelle des Rose-Croix, celle de l’Homme écartelé entre la Chair et l’Esprit, cette Croix d’épine symbolique sur laquelle il convient d’attacher la Rose de la connaissance. C’est ce que suggère aussi le merveilleux psaume, adapté de Paul Celan que je vous propose maintenant.

 La Rose, par-dessus l’épine !


Personne pour nous repétrir de terre et d’argile,
Personne pour bénir nos poussières,
Personne !
Loué sois-tu, Personne.
C’est pour l’amour de toi que nous voulons fleurir.
À ta rencontre,
À ton encontre.
Un rien,
Nous le fûmes, nous le sommes,
Et nous le resterons.
Un rien en fleur,
La rose du rien,
La rose de personne,
Rose au style lumineux comme une âme,
A l’étamine des cieux embroussaillés,
Et la corolle rouge
Du mot pourpré que nous chantons,
Par-dessus,
Ô combien par-dessus
L’épine.

LE FRUIT QUE J'AI ENGENDRÉ EST LE SOLEIL !

Essayant de résoudre les questions insolubles posées par la raison sur l’origine, le devenir, le sens de la vie et de l’existence, l’Homme interroge le ciel, mais le ciel ne répond jamais aux questions raisonnables et ne parle qu’à l’Homme qui n’a plus de questions.

Le silence des espaces infinis est la seule réponse. La question est toujours mal posée par une raison qui cherche à combler son vide de savoir. Or, elle ne pourra jamais combler ce manque inéluctable de connaissance totale comme le laisse entendre Saint John Perse.

 Je t’interroge, Plénitude, et c’est un tel mutisme !

Le grand Tout universel, reste mystérieux et inconnaissable. Lorsqu’on tente de l’approcher par la raison, on trouve seulement le vide, le chaos de la béance originelle. Hors la pensée, il n’y a rien pour alimenter la raison humaine, rien que ce vide effrayant que nous percevons. Car c’est la pensée créatrice qui peuple le vide, et notre inconnaissable univers matériel est la manifestation d’une pensée surhumaine. C’est pourquoi d’ailleurs nous nous y sentons tellement étrangers. Lorsque nous laissons enfin notre intelligence rejoindre la grande intelligence universelle, ce vide insondable et sacré s’emplit soudain d’un nombre immense de créatures et de toute la puissance qui les a créées.

 Ce vide n’est pas le non-être, le néant.
C’est au contraire l’être le plus complet qui soit
puisqu’il contient l’univers en puissance.
(Georges Cahen).

Les hommes, nous dit la Bible, enfant divins et créatures faites à la ressemblance de Dieu, sont comme des dieux, et ils engendrent des dieux et des mondes. Le chaotique océan des possibles attend leur pensée créatrice de genèses potentielles. Sous-dieux naissants, engendrés dans ce monde par l’Esprit, les humains deviennent, peu à peu, adultes et autonomes.

 

Ainsi, par le pouvoir créateur de la pensée, poursuivant inconsciemment une illusoire immortalité, nous devenons chaque jour plus capables de modeler l’argile plastique du Monde. Nous le faisons d’abord par l’art ou par la pensée puis nous abordons, par la science, la transformation ou l’organisation de la matière tangible et expérimentable. Et maintenant, nous commençons à modifier les propriétés mêmes et les destinées de nos propres corps biologiques. Comprenons qu’en saisissant ainsi la matière, nous tentons encore, en fait, de devenir un Dieu sur la Terre.

Or, quand les écritures nous disent qu'en vérité nous sommes déjà des Bouddhas, des dieux, elles ne parlent pas des humains ordinaires, des petits simiens clairvoyants, mais elles signifient cette étincelle divine qu'ils portent, et qui  nous habite et nous appelle d'une voix que l'on dit faible.

Voici encore mon petit témoignage. Personnellement, je ne perçois pas cette voix si faible. Bien au contraire. Chaque jour, j'entends davantage la clameur de l'être intérieur qui m'habite, proclamant sa réalité et sa vie. Mais je crois que nous ne voulons pas entendre non pas ce murmure mais ce cri, et que nous lui fermons étroitement nos oreilles.

Nous demandons à la Maya d'illusion de nous assourdir parce que nous avons terriblement peur. En fait, notre ego est réellement terrifié par une connaissance inconsciente puisée ailleurs, peut-être dans sa ressouvenance. Inconsciemment, il sait qu'il doit disparaître pour faire place à l'être immortel qui l'interpelle et s'agite en lui. Il résiste mais il sait bien qu'un jour, l'immortel intérieur occupera toute la place, tout l'espace intime, et qu'il croîtra jusqu'à sa dimension et sa clarté véritables, celles du Soleil.

 

Lumière et vie, voilà ce qu'est le Dieu et Père,
de qui est né l'Homme.
Si donc tu apprend à te connaître
comme étant fait de vie et de lumière,
et que ce sont là les éléments qui te constituent,
tu retourneras à la vie.


(Hermès Trismégiste - Poïmandres).

Amis, nous allons maintenant nous quitter, mais il nous faut un instant penser au lecteur ingénu qui pense s’être fourvoyé par hasard dans ce livre, nous suivant jusqu’ici par curiosité ou par gentillesse, à moins cependant qu’un mystère intérieur l’ait guidé.

 A cet homme encore inconscient de sa qualité cachée mais pourtant déjà chargé de lumière et porteur lui aussi de l’Esprit, au chercheur inquiet quêtant toujours éperdument en ce bas monde la vérité et la connaissance, la chaleur et l’amour, la lumière et le sens de la vie, il convient peut-être de rappeler maintenant l’antique message laissé dans le temple de Saïs par la fille d’Atoum, le dieu solaire primordial et créateur, (à la fois Tout et Rien, Être et Non-être), afin de lui redire les lumineuses paroles de l’aimable déesse, image symbolique et éternelle de la Grande Mère de tous les vivants.

Le fruit que j’ai engendré, disait Isis, est le Soleil !

ISIS
 

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