Le Ciel, la Vie, le Feu
|
|
Religions à Mystères et Proto Christianisme.
|
Garde
bien dans ton intellect tout ce que tu veux savoir, Loeil par lequel je
vois Dieu Lhomme ne peut vivre
que tant quil a un contact
Nous allons maintenant nous pencher sur les origines de notre propre civilisation occidentale. Ici comme ailleurs, lapproche historique est une démarche indispensable. Elle seule autorise la prise en compte des influences réciproques des diverses civilisations primitives. Celles-ci sont entrées très tôt en interaction. Dans nos régions occidentales, elles sétaient déjà heurtées et adaptées les unes aux autres avant même que soient formulées les bases de notre civilisation et des religions et croyances quelle a ensuite produites ou portées. LHistoire donne une conscience plus claire des origines des mythes ainsi que de leur évolution au cours du temps. Elle permet de reconnaître les situations relatives des différents peuples alors même que leurs relations ne sont pas évidentes. En Europe de lOuest, on peut ainsi établir que lérection des mégalithes a très largement précédé la construction des Pyramides égyptiennes. Les Mégalithes sont plus anciens que les Pyramides. Lérection des mégalithes semble pouvoir être placée entre ~3500 et ~2500 avant le début de notre ère. La civilisation des mégalithes aurait donc très largement précédé la construction des Pyramides égyptiennes. En occident, elle aurait été contemporaine des plus anciennes civilisations connues, sumérienne, mésopotamienne, syrio-phénicienne, égéenne, crétoise et achéenne. Les dolmens tabulaires ont été tardivement utilisés comme des nécropoles, mais ils avaient une vocation originelle aujourdhui oubliée. Leur zone de répartition est très large. Elle va de la Scandinavie à lEspagne, en France, en Corse, en Afrique du Nord, à Malte, en Turquie, en Palestine, en Inde, et même en Corée. Beaucoup de mégalithes ont été détruits mais il en reste encore un grand nombre. On en dénombre quatre mille cinq cents en France, huit cents dans lîle de Man, neuf cents en Allemagne, cinq mille en Algérie, trois cents en Corée. Les menhirs ou pierres levées posent les mêmes insolubles problèmes. Ils sont également parfois groupés en grand nombre. Les alignements de Carnac comptent trois séries de plusieurs milliers de menhirs rangés et hiérarchisés. Tous ces monuments ont été élevés par des populations nombreuses et très organisées. Les hommes qui édifiaient ces énormes monuments ne connaissaient pas lécriture. Probablement Ibères, précurseurs des Celtes, ils ne nous ont laissé que quelques vagues gravures, peut-être symboliques, qui restent encore pour nous, jusquà ce jour, dépourvues de sens. Venus du mystère, ils sont rentrés dans le mystère. Heureusement, dautres civilisations européennes nous sont mieux connues. Beaucoup plus tard, et plus prés de nous, la civilisation lusacienne puis les civilisations celtiques de Hallstatt et de la Tène ont laissé quelques vestiges. A partir du ~2ème millénaire, venant dAllemagne, les peuples celtes occupèrent une grande partie de lEurope, (La Grande Bretagne, la Gaule, lEspagne, lItalie du Nord, les Balkans, lAsie Mineure). Ils entrèrent occasionnellement en conflit avec les Grecs ou les Hittites, (Prise de Delphes, Incendie de Troie). Cependant, les dieux oubliés des Celtes et de leurs druides métaphysiciens ne nous sont guère connus que par les relations assez inexactes de César. Les Gaulois semblent avoir dabord révéré la déesse mère Mélusine. Probablement devenus presque monothéistes, ils paraissent avoir ensuite adoré un grand dieu dont les traces subsisteraient dans le mythe de Gargantua. Comme les autres Celtes, Gallois ou Irlandais, les Gaulois étaient des guerriers féroces et redoutés. Ils pratiquaient des sacrifices de chevaux et de bétail, et des sacrifices humains occasionnels, parfois multiples, par noyade dans un tonneau, ou par crémation. Tous les Celtes croyaient à lunicité et à léternité de lêtre, à travers la multiplicité des formes de sa manifestation. Voici une réminiscence assez récente trouvée dans la tradition du Pays de Galles. Jai été
sous de nombreuses formes, La mythologie celte est définitivement perdue car ses rares écrits sont indéchiffrables. Il ne nous reste que les traces de quelques légendes comme celle du roi Ambigatus (Conchobar ?) dont les neveux Segovesos (Cùchulainn ?) et Bellovesos (Conall Cernach?) auraient franchi les Alpes et fondé Milan. Il y a beaucoup dautres récits merveilleux et féeriques dans les cycles insulaires dUlster et dOssian, comme la très mystérieuse légende du mariage de Branwen où apparaît déjà le lointain ancêtre du Graal, le fameux chaudron de résurrection des guerriers morts au combat, ainsi que lhistoire de la tête coupée de Bran, restée vivante et protectrice du royaume avant le roi Arthur. César nous dit des Gaulois quils
étaient natio dedida religionibus, une nation adonnée
à la religiosité. Ils usaient dune écriture (hélas
illisible). La classe sacerdotale des druides se préoccupait
surtout de conceptions religieuses métaphysiques, éternité
des dieux, immortalité de lâme, existence dun
autre monde, états multiples de lêtre. Les
druides nutilisaient pas de temples de pierres ni dimages
durables. Les lieux et objets de culte étaient en bois.
Il sagissait souvent de simples clairières consacrées,
dans les forêts. Derrière les apparences du folklore légendaire,
la mystérieuse religion celtique était à la fois
intellectuelle et sacerdotale. |
En Amérique du Nord, on peut aussi citer le tertre du Grand Serpent, dans lOhio, mais cela semble être une construction plus récente, datant du 11ème siècle. Dans les Alpes françaises, la Vallée des Merveilles présente également de nombreuses gravures ou inscriptions mystérieuses réalisées à ciel ouvert, il y a 4/6000 ans. En Angleterre, on trouve le Cheval dUffington qui mesure 110m de long et semble dater de lâge du bronze, (1500 ans avant JC.). Le Géant du Cerne Abbas, (célèbre par son aspect viril particulièrement avantageux), serait bien plus tardif, datant du 18ème siècle. Au Pérou, sur le site de Nazca, dimmenses réseaux de lignes ont été découverts à partir des survols aériens. Ils sont accompagnés de dessins gigantesques représentant des êtres divers, animaux pour la plupart. Leur signification serait liée au cycle des eaux et au Dieu des sources, (Kön). Ils seraient datés de ~500 à 500 après JC. Maria Reiche, préhistorienne allemande (décédée), a consacré sa vie à leur étude. Dans le désert dAtacama, dans le nord du Chili, les géoglyphes consistent en structures de pierres amassées. Les entassements représentent des animaux, camélidés par exemple, ou des personnages gigantesques. Le géant dAlcatama a plus de cent mètres de long. Les dessins auraient été réalisés lentement par les caravaniers, à partir du 4ème siècle. Lorsquils ont une signification religieuse, la construction de ces immenses figures pourrait être une démarche dinterpellation de la divinité, en relation avec la dimension quon lui donne et avec le ciel où on la situe. Il faut que le message envoyé par les petits hommes soit enfin vu et compris par le dieu invoqué qui parait ne pas les percevoir. Il doit donc être à sa taille. Nous faisons parfois la même chose, en chantant tous ensemble, pour que notre voix plus forte arrive enfin aux lointaines oreilles de notre propre Dieu, lequel parait souvent bien trop sourd. De profondis
clamavi at te, Domine. Revenons-en donc aux cieux méditerranéens. Ainsi donc, il y a trois mille huit cents ans, les Hyksos apportèrent en Egypte la référence à Seth. Celui-ci fut parfois identifié au 3ème fils dAdam et Eve, concept qui fut ultérieurement repris dans la religion des Séthiens. Le mythe fondateur aurait donc déjà existé en Asie antérieure, à cette époque. Au début de lâge de fer, deux mille ans avant notre ère, au Moyen Empire, sous les 11ème et 12ème dynasties, les Egyptiens avaient colonisé la Nubie et étendu leur influence sur la Phénicie et la Palestine. Ils avaient engagé des relations commerciales avec tous les riverains de la Mer Rouge. LEgypte était alors en contact avec les peuples extérieurs et profitait de leurs apports matériels et culturels. A ce moment, les souverains favorisèrent le culte dAmon (Dogme Thébain), et les prêtres sy opposèrent en renforçant le culte Osirien. Le mythe dOsiris se présentait alors sous une forme simplifiée, différant un peu de ce que vous avez lu dans le précédent chapitre. Le dieu suprême, Ptah avait créé la Terre, (le sol mâle, Geb), le Ciel, (la voûte céleste, Nout), séparés par lAir, Chou. De la même façon, dans le Brahmanisme indien, Brahma sépara loeuf primordial en deux parties, Svarga, le Ciel, mâle, et Prithivï, la Terre, et il plaça entre eux lAir, Antariksha. En Egypte, Nout sunit ensuite à Geb et donna naissance à deux jumelles, Nek-Bêt et Isêt, (Nephthys et Isis pour les Grecs). Puis Nout sunit à son père suprême, Ptah, et conçut Oussir, (Osiris), fondateur de lEgypte. Ensuite Osiris épousa Isis et engendra Hor, (Horus), qui deviendra Harpocrate à lépoque Ptolémaïque. Trois cent ans plus tard, lEgypte fut conquise par des tribus asiatiques sémites, les Hyksos, qui avaient des chevaux et des chars de guerre inconnus des Egyptiens. Ils sinstallèrent dans le pays, pendant deux siècles, en y amenant leurs propres cultes et leurs croyances dérivées des religions dAsie antérieure. Cest à ce moment et sous cette influence étrangère imposée, que le mythe osirien fut modifié et quOsiris devint le fils de Geb, (le sol), et de Nout, (la voûte céleste). Les Hyksos vénéraient tout particulièrement Seth, lun des nombreux Baal sémites. Ils en firent un dieu égyptien nouveau, autre fils de Geb et de Nout, ce qui le mettait sur un pied dégalité avec Osiris. Seth fut intégré au panthéon égyptien sous le nom dOussit. Les deux couples jumeaux, Osiris (Oussir), et Isis, Seth (Oussit), et Nephti, furent alors placés sur un même plan. Au début du Nouvel Empire, vers ~1580 avant JC, le roi thébain Ahmosis fonda la 28ème dynastie, expulsant les Hyksos qui se réfugièrent en Palestine, mais Seth resta en place. Le dieu nouveau devint le dieu du mal. Les Egyptiens réglèrent leurs vieux comptes avec Seth et en firent un dieu maléfique personnifiant le mal. Les nouvelles bases du mythe osirien étaient posées, qui mettaient en opposition le Bien et le Mal, conception dérivée des concepts apportés dAsie antérieure par les envahisseurs Hyksos. Ultérieurement, les rois égyptiens devinrent suzerains de la Nubie, et soumirent à tribut tous les états dAsie antérieure, la Syrie, les royaumes hittites, jusquà lEuphrate. Plus tard les Hittites reprirent la seule Syrie. Ramsès II rétablit la paix. Entre ~1370/~1350, apparut ce que lon a appelé la révolution amarnienne. Akhenaton et Néfertiti instaurèrent
difficilement le culte monothéiste provisoire dAton
et fondèrent la capitale dAkhet-Aton.
Toutankhamon, successeur dAkhenaton, rétablit, après
sa mort, le culte traditionnel dAmon. Freud nous
dit quà cette période les Hébreux ont quitté lEgypte
sous la conduite de Moïse. Celui-ci avait ses entrées
au palais, et il était donc un prince ou un général égyptien,
(comme le dit très clairement Flavius Josèphe). Au déclin
du culte dAton, lanarchie sinstalla
dans le pays. Accompagné des fidèles monothéistes irréductibles,
(les futurs Lévites), Moïse séduisit quelques nomades
sémites installés en Egypte, et les emmena à la conquête
de Canaan. La Palestine était alors une colonie égyptienne.
Moïse ne partait donc pas à laventure à travers
un désert inconnu. Beaucoup plus tard, les Judéens, libérés
par Darius, ramenèrent en Egypte leur foi en un Dieu
unique. Ils y revinrent en très grand nombre après la
conquête par Alexandre le Grand, à tel point quAlexandrie
en vint à compter plus de Juifs que Jérusalem. |
LEmpire de Rome est alors à son apogée. Il a même intégré le grand Empire dAlexandre et réunit une part très importante de la population mondiale. Il sétend de la Manche à la Mer Rouge et à lAtlantique, incluant Grande Bretagne, Gaule et une partie de la Germanie, Ibérie, Italie, Grèce et Balkans, Afrique du Nord et Egypte, Perse, Turquie, et tous les petits états riverains de la Méditerranée, la Mare internum, (ou nostrum), la Mer Romaine privée. Malgré les innombrables difficultés liées à la dimension de lempire et aux ambitions humaines, les empereurs romains ont su mettre en place les structures politiques, administratives, économiques, commerciales, juridiques, militaires, (et même religieuses), nécessaires pour faire fonctionner cet immense ensemble et assurer sa sécurité. Rien de comparable na été reproduit par la suite. Jamais dans lHistoire, les échanges nont été plus faciles et plus sûrs, au sein de lensemble méditerranéen unifié, quau temps des Romains. Les cités et les campagnes reçoivent leau distribuée par des aqueducs. Des réseaux de voies de communication, terrestres et maritimes, permettent de voyager facilement dans tout lEmpire. De nombreux voyageurs les utilisent activement pour échanger les idées et les marchandises.
Les penseurs turbulents mais tolérants. Depuis Alexandre, le phare culturel dAlexandrie rayonne sur la Méditerranée. Dans les quelques siècles qui encadrent la naissance du Christianisme, de nombreux courants de pensée agitent le monde antique. Les différentes écoles envoient des missions un peu partout pour répandre leurs cultes et leurs idées, et cela concerne aussi la Palestine et le Judaïsme. Cette importante turbulence amène des confrontations qui opposent les vieux cultes traditionnels aux religions nouvelles, et aux idées des penseurs néo-platoniciens, hermétistes, gnostiques et chrétiens. Les cultes extatiques des Mystères. Il faut maintenant parler des étonnants Cultes à Mystères qui étaient alors pratiqués en Grèce et dans tout lEmpire Romain. Les plus connus sont les Mystères dEleusis, qui célébraient le culte des deux déesses, Déméter (Cérès à Rome), et Perséphone, mais dautres cultes étaient rendus à Apollon, Dionysos, Cybèle et Attis, Mithra, Astarté, Pan, Adonis (et Atargatis, déesse syrienne dont le culte était proche du précédent). Il faut aussi citer des cultes égyptiens très célèbres tels ceux dIsis, Sérapis, ou Anubis, et divers Baal, (sauveurs), connus sous les noms de Jupiter Héliopolitain, en Syrie, et de Jupiter Dolichénien. Avant den examiner quelques uns, je voudrais vivement attirer votre attention sur limportance de ces cultes à Mystères. Ils introduisent dans les pratiques religieuses antiques les concepts dimmortalité de lâme, de salut et de résurrection. Sous linfluence de lhellénisme qui les tolère, et au contact des très nombreux immigrants qui sinstallent dans lempire, les Romains accentuent encore leur grande facilité dassimilation. Ils adoptent les nouveautés doctrinales des croyances étrangères et transforment les cultes orientaux dont les pratiques inhabituelles viennent secouer la morne monotonie de leurs habitudes. La plupart des nouvelles liturgies, (et
ultérieurement le Christianisme), sadressent à
des dieux souffrants dont les cultes évoquent la passion.
Les fidèles reproduisent sur eux-mêmes les tribulations
du dieu. Ces pratiques entraînent des privations pénibles
et des souffrances occasionnellement sanglantes. Elles
provoquent aussi de frénétiques comportements de défoulement
et des émotions violentes qui fascinent les citoyens
romains blasés et fatigués par la décomposition
politique et les traditions vieillissantes. Les initiés
pratiquent même parfois des automutilations et des rites
pénitentiels de flagellation. Des paroxysmes extatiques
accompagnent la révélation progressive du dieu. Les
liturgies, prenantes et colorées, sappuient sur
des initiations successives qui expliquent les
significations cachées des Mystères. Elles sont
accompagnées de baptêmes exaltants dont les rites de
mort et de résurrection marquent la progression des
initiés vers le salut dans un autre monde. Dans chaque
niveau initiatique, des cérémonies marquent lentrée
dans une fraternité accueillante, et les rituels
comportent souvent des repas en commun qui soudent la
communauté. |
Fécondée par Zeus, Perséphone conçut ensuite un fils, Zagréus, également ressuscité, dont lhistoire éleusinienne est analogue à celle de Dionysos. Poursuivi par la jalousie de Héra, (ou Junon), épouse de Zeus-Jupiter, Zagréus revêtit plusieurs apparences. Transformé finalement en taureau, il fut dévoré par les Titans mais la déesse Pallas, (Athéna), réussit à préserver son cœur encore palpitant. Zeus foudroya les Titans et absorba le coeur de son fils qui, régénéré, devint Iacchos, assimilé à Bacchus, lui-même identifié à Dionysos. (Les Romains identifiaient Perséphone à leur Proserpine, déesse des Enfers). Les Eleusinies sont les fêtes les plus connues du culte de la déesse. Elles auraient été institués à linitiative de Triptolème, fils de Céréos, qui avait reçu de Déméter la mission de répandre le blé partout dans le Monde. Ils semblent provenir de cultes agraires primitifs assez fortement modifiés en syncrétisme avec des cultes dionysiaques et lOrphisme. Ils étaient annuellement célébrés dans le Télestrérion dEleusis et faisaient participer le fidèle à la résurrection de lenfant divin revenu de lempire de la mort. Il nous faut donc présenter cet Orphisme, qui, en raison de la concordance des mythes orphites et éleusiniens, réussit à sinfiltrer dans la religion athénienne, influençant les rites des Mystères. Cétait une religion initiatique à tendance monothéiste marquée. Elle reposait sur les philosophies pythagoricienne, platonicienne puis néo-platonicienne et rassemblait donc diverses doctrines professant limmortalité de lâme et la succession de cycles de réincarnations jusquà la purification définitive. LOrphisme proposait aux fidèles des rites mystiques, des suites dinitiations, et des règles ascétiques de vie. Les adeptes étaient opposés à toute violence. Ils étaient végétariens et ne consommaient aucune chair. Dans le mythe orphite, la mère de Dionysos, Sémélé, était mortelle. Aimée de Zeus, elle mourut deffroi au sixième mois de sa grossesse, à la vue de la gloire du dieu. Zeus-Jupiter porta alors lenfant cousu dans sa cuisse jusquà sa naissance. A travers sa double naissance, mortelle par sa mère et divine par son père, Dionysos apportait lénergie sacrée à la nature ordinaire. Chaque année, il entrait en cortège dans la cité grecque qui laccueillait avec des fêtes bruyantes et colorées. Il se manifestait différemment dans les Mystères extatiques accessibles aux seuls initiés. Les deux légendes concordent, mais ici Dionysos-Bacchus est originellement le fils de Zeus et de Perséphone. Egalement jalousé par Héra, il est tué et dévoré par les Titans primordiaux. Zeus les foudroie, sauvant le seul coeur dont il féconde Sémélé. Dionysos ressuscité est ainsi né deux fois, ce qui est aussi son nom. Les hommes naissent des cendres des Titans foudroyés. Leur nature est donc animale et matérielle, mais ils recèlent cependant en leur âme une parcelle du Dieu dévoré. Sachez aussi que, dans le système théogonique des adeptes dOrphée, six générations divines se succèdent en bouclant sur elles-mêmes. Phanés, (la Lumière originelle), Fils de Zeus et de Métis, est le premier roi des Dieux, suivi de Nuit, dOuranos, de Kronos, et de Zeus, prononcé Deus par les Romains, et aussi par nous-mêmes. Celui-ci remet enfin son pouvoir au fils, deux fois né, Dionysos, lequel est aussi le retour eschatologique de Phanés, le Lumineux des origines. A Eleusis, en Septembre, avant lautomne, des cérémonies extérieures traditionnelles préparaient la célébration des Mystères. Ces manifestations préliminaires ont été souvent décrites et nous sont relativement connues. Des reliques mystérieuses, (les hiéra sacrées), étaient transportées en procession jusquà Athènes et déposées dans un sanctuaire particulier, lEleusinion. Une excommunication solennelle était prononcée contre les infidèles et les impurs, puis les mystes, (les candidats jugés dignes), entraient dans la mer pour se purifier. Après quelques jours de retraite et de jeûne, la procession immense des fidèles et des mystes retournait à Eleusis, précédée de leffigie de Iacchos, des hiéra, et des autorités. Les cérémonies secrètes commençaient alors, et nous devons ici avouer notre très grande ignorance. Les rites des Mystères dEleusis sont restés mystérieux. La divulgation des rites secrets était rigoureusement interdite. Les Mystères dEleusis étaient extrêmement populaires au-delà même des limites de la Grèce, au point que la salle dinitiation, le Télestrérion, atteignit finalement une surface de deux mille six cents mètres carrés. Malgré le nombre immense des fidèles, aucun auteur ancien na jamais commis le sacrilège de rompre cet interdit. Nous savons seulement quils étaient destinés à séparer les initiés, appelés à jouir éternellement de la vraie vie au-delà de la mort, des non-initiés destinés au bourbier infernal. Après avoir rompu le jeûne et absorbé le Kykéôn, simple bouillie de blé commémorant le premier repas de Déméter à Eleusis, les mystes recevaient des initiés une révélation bouleversante. Bienheureux
qui a reçu cette vision, Je voudrais ici attirer vivement lattention
du lecteur en le priant de remarquer que linitiation
éleusinienne assurait par elle-même le salut et la
future survie personnelle du myste. Définitivement sauvé
par les vertus magiques de cette entremise extérieure,
il nétait tenu à aucun comportement éthique ou
moral particulier. En cela, au moins autant que par les
préoccupations relatives à la vie future et la tendance
au monothéisme héritée de lOrphisme, les Mystères
dEleusiniens ont préparé le passage du paganisme
aux cultes modernes, et tout particulièrement au
Christianisme. |
|
La religion chrétienne, relativement simpliste, enseigne quun envoyé divin réalise le salut universel par la seule grâce divine (et par le moyen dun rachat lié au sacrifice rituel du Fils de Dieu). Lobtention du salut est facile puisquil est collectif et extérieur au mérite personnel. Sur ces bases comparatives, et en y ajoutant leffet de la mise en oeuvre de la puissance de lappareil impérial, on comprend mieux quelle se soit rapidement et largement développée. Dautres facteurs politiques et économiques ont joué. Il y avait une grave crise du Pouvoir, et lEmpire était partagé. Les Romains avaient vaincu de nombreux peuples et les avaient soumis à de lourds tributs. Cela entraîna des désordres économiques considérables. Dénormes quantités de lor oriental furent drainées vers Rome tandis que les Barbares voisins sappauvrissaient. Les riches Romains se complaisaient dans le luxe extrême et toute lactivité de lEmpire dépendait des innombrables esclaves ou mercenaires indispensables à la vie et à la défense de la Cité. Lor des tributs achetait ces esclaves aux Barbares. Leur sort et celui des pauvres était misérable. Le Christianisme prônait légalité des hommes, tous enfants de Dieu. Il réclama et il obtint enfin que lon cessa de séparer les époux et de disperser les familles des esclaves. Il devint alors la religion des pauvres et des opprimés. Cela lui donnait un poids politique considérable que les empereurs affaiblis et divisés durent prendre en compte. Les richesses de Rome attiraient les convoitises. Les Barbares se retournèrent contre lEmpire et le détruisirent. Au début de lère, Rome comptait un million dhabitants. Cinq cents ans plus tard, il en restait quarante mille. A la fin du Moyen-Âge, moins de vingt mille habitants erraient dans les ruines. La survie de la ville de Rome dépendait alors totalement du Christianisme. La même situation sest souvent
produite dans lHistoire.
Le Feu dans le Monde. Riche de la
sève du Monde,
|
|
page précédente Comme des Flambeaux dans la Nuit |
page suivante Ombres et Lumières |
|
Vous pouvez aussi le télécharger partiellement au format Word en cliquant ici |
|